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Contes d'ici et d'ailleurs

Démarré par bunni, 18 Septembre 2012 à 00:22:36

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bunni


LE PERE NOËL ET LE PETIT CHAT

La neige tombait sur la ville sans faire de bruit. Le petit chat marchait dans la neige sans faire de bruit. Les flocons saupoudraient de blanc ses poils roux. La rue était déserte, c'était la nuit de Noël !

Bientôt, les douze coups de minuit allaient sonner pour la plus belle nuit de l'année.

Mais le petit chat ne le savait pas. Il n'avait que trois mois et avait encore beaucoup de choses à apprendre. Surtout cette nuit où il faisait si froid ! et il ne savait pas où se nicher pour dormir. Il était seul pour se débrouiller, si seul et si ignorant des astuces.

Ce n'est pas comme ce gros matou gris de tout à l'heure qui l'avait chassé du coin chaud où il s'était blotti. Il en savait des choses, lui ! mais quel égoïste ! croyez-vous qu'il aurait partagé ce qu'il était en train de manger ?

"Va pleurnicher ailleurs" lui avait-il dit.

Aussi, le petit chat marchait seul dans la rue. Il avait faim, il avait froid. Et il regardait les fenêtres éclairées derrière lesquelles il devait faire bon vivre.

Entendit-il sonner les douze coups de minuit? ça n'est pas sûr mais, par contre, il entendit parfaitement quelque chose passer au-dessus de lui, comme le vol d'un gros oiseau.

Il s'aplatit au sol de frayeur; quand il osa relever le museau, un drôle d'engin venait de se poser sur la maison d'en face. Il n'avait jamais rien vu de pareil ! Et maintenant, voilà qu'un gros bonhomme tout en rouge en sortait avec un sac sur le dos.

Et devant le drôle d'engin, deux grands rennes se mettaient à parler au bonhomme tout en rouge :

-Fais attention Père Noël, disait l'un, la cheminée n'a pas l'air bien solide !

-Ne te mélanges pas dans ta liste, disait l'autre, ici, c'est des rollers et une panoplie

-Mais oui, mais oui .... Vous n'allez pas commencer à me surveiller quand même ! vous savez bien que je ne me trompe jamais !

D'en bas, le petit chat ne pouvait pas voir si ce bonhomme avait une barbe blanche. Il lui trouva quand même une ressemblance avec le bonhomme en manteau rouge des images qu'il voyait partout dans la ville depuis quelques jours.  Mais, que faisait-il donc là-haut?

Pour en avoir le coeur net, il décida d'aller voir ça de plus près;

Oui, mais comment faire pour monter? En passant par les escaliers? C'est que le petit chat gardait le souvenir cuisant des méchants coups de pied qu'on lui donnait quand il voulait rentrer dans une maison.

Il fit donc le tour de l'immeuble et finit par trouver un endroit pour grimper jusqu'au premier étage. Ce ne fut pas très difficile. Restaient deux autres étages et avec des pattes gelées, ce n'était pas évident !

Il lui fallut sept essais avant d'arriver en haut. Sept essais dont quatre moments d'équilibres acrobatiques, trois griffes arrachées et un rétablissement miraculeux.

Mais ça y était, il était sur le toit, il allait savoir.

L'engin était toujours là. Les rennes bavardaient entre eux de choses que le petit chat tout essouffé ne comprenait pas.

Il était question d'une liste avec des noms de garçons et de filles, d'horaire à suivre, d'adresses... Le petit chat se dirigea sans bruit vers l'engin. C'était plein de sacs dedans. Et plein de paquets aussi. Des gros, des très gros même, des plus petits, des minuscules. Tous avaient des couleurs joyeuses et scintillantes qui lui donnèrent envie de jouer avec. Il sauta hardiment dessus. Malheur! une petite musique se déclencha sous ses pattes. Le coeur battant, il s'enfuit au fond du traîneau où il trouva un sac à demi - ouvert pour se cacher.

C'était tout sombre dedans mais il y faisait chaud et doux. Le petit chat sentit des poils contre lui. Il renifla pour comprendre si c'était un autre chat ou un de ces monstres de chien mais comme ça ne sentait ni l'un ni l'autre et que ça ne bougeait pas, il se blottit tout contre, rassuré. Puis il attendit.

Dehors, un renne parla :

-çà doit être un appareil de musique qui s'est encore déclenché tout seul !

Puis la voix du vieux bonhomme à l'habit rouge retentit, sonore et joyeuse :

-Allons-y mes amis, au suivant de la liste !

Le petit chat sentit tout bouger autour de lui; Il eut la sensation de s'envoler puis quelques instants après, un coup de frein suivi d'un choc le déséquilibra. Son coeur tapait fort. Dehors, le vieux bonhomme riait :

-Ah! Ah! Ah! cette fois, la cheminée est large, je vais pouvoir descendre à l'aise

Le petit chat commençait à sortir le museau dehors quand tout bascula brusquement. Secoué de droite et de gauche, il roula dans le sac parmi les paquets qui l'écrasaient.

Une grande descente dans le vide lui remonta l'estomac dans le gosier... Il miaula fort. Une main l'attrapa par la peau du cou. Un grand rire résonna à ses oreilles :

-Mais qu'est-ce que je vois là? Mais croyez-vous ça ! un passager clandestin !

Le bonhomme en habit rouge le tenait en l'air en riant très fort. Ses yeux riaient autant que sa bouche.

Tu as donc voulu savoir comment je m'y prend pour faire ma tournée?

Mais le petit chat était effrayé. Et il avait si faim et si froid qu'il miaulait à s'en étrangler et qu'il tremblait à en claquer des dents.

-dis-moi, dis-moi, tu n'as pas l'air si courageux que ça pour un petit curieux ? Il suffit qu'on te découvre pour que tu appelles maman au secours ? Allons, voyons, je suis le PERE NOËL, tu n'as rien à craindre de moi. Bien sûr, je devrais te punir de m'avoir suivi alors que personne ne doit accompagner le Père Noël pendant sa tournée mais, comme tu viens de me donner une très bonne idée, je ne dirai rien et je vais même te garder un petit moment avec moi.

Et le Père Noël le mit dans la grande poche de son manteau. C'était doux à l'intérieur et c'était chaud. Le petit chat s'y trouva bien de suite.

Il ne savait pas encore qu'il allait vivre ce qui sera la nuit la plus extraordinaire de son existence. Ah, si seulement il n'avait pas cette faim atroce au ventre !

Il se redressa pour sortir le nez et pousser un petit miaulement de détresse. Peut-être que ce gentil bonhomme comprendra son problème.

-Veux-tu bien te taire, tu risques de réveiller les enfants! si tu veux m'accompagner, il faut rester silencieux. Aussi silencieux que la neige qui tombe.

Le bonhomme était en train de déposer des paquets auprès de deux paires de chaussons, tout petits, si petits qu'ils disparaissaient sous les paquets;

-tu vois, ici, c'est pour Mélanie : elle a commandé un poney en peluche et une piscine magique. Là, c'est pour Lucas, il a demandé un établi de moulage. Et regarde comme ils sont gentils tous les deux, ils ont laissé une tasse de lait et des biscuits pour moi. Ils savent que je suis un peu gourmand, tu comprends ? et puis ça me redonne des forces. Hé, mais qu'est-ce que tu fais?

Le petit chat s'était jeté sur le lait et il le lapait en s'étranglant tellement il allait vite

De retour au traîneau, le Père Noël s'approcha des rennes avec un air mystérieux

-regardez qui va passer la nuit avec nous !

Il sortit de sa poche une petite boule de poils ébouriffés et aux babines barbouillées de lait.

-Il avait si faim, le pauvre chaton, que j'ai partagé mon goûter avec lui .. Enfin, disons qu'il m'en a laissé quelques gouttes ! allez les rennes, aux suivants !

Le petit chat garda les yeux écarquillés toute la nuit; Jamais il n'avait vu autant de belles choses, jamais il n'avait vu autant de couleurs scintillantes, jamais il n'avait vu autant de jouets et jamais il n'aurait crû que quelqu'un pouvait avoir autant de joie à déposer dans les maisons toutes ces merveilles.

À la fin de sa tournée, le Père Noël rentra dans une demeure où brillait une lampe de chevet dans une chambre. Des pantoufles de grand-mère attendaient près du lit.

-tu vois, ici habite une gentille mamy qui m'a écrit pour me demander un cadeau. Elle voudrait quelque chose qui puisse la distraire pendant ses longs jours solitaires et qui, en même temps, attirerait ses petits-enfants pour qu'elle les voit plus souvent. Alors, j'ai pensé à toi. Tu sera heureux ici ! regarde comme tout est accueillant ! tu seras bien au chaud et je suis sûr que tu te régaleras ! les grand-mères savent si bien faire la cuisine! mais, chut .... Ne dis à personne que tu m'as accompagné cette nuit.

Il déposa doucement le petit chat dans une pantoufle, lui fit un gros bisou et attendit qu'il s'endormit, le museau niché dans les pattes, le coeur à jamais étoilé de cette merveilleuse nuit de NOËL.

bunni


Le noël d'une petite fée

Je me présente : Je suis Sweet la petite fée des bois.

Je suis à peine plus grande qu'une fleur mais je suis une intarissable bavarde !

Cette nuit-là il avait neigé. Au matin, chaque arbre, chaque buisson scintillait au soleil. C'était une merveille ! Le temps idéal pour la promenade.

J'enfilai mon manteau de laine rouge, chaussai mes bottines en nacre et me voilà partie...

Je volais par-dessus les prés et les champs, en écoutant chanter le vent. Près du grand sapin bleu, j'aperçus trois enfants qui construisaient un bonhomme de neige.

-Ce soir, c'est  Noël, chouette ! Disait l'un.

Il fixa plusieurs pierres sur la face blanche du bonhomme, en guise de bouche.

-J'aimerais bien avoir mes cadeaux, tout de suite ! s'exclama le deuxième.

Il ôta son écharpe pour entourer le cou neigeux.

Quant au troisième, le plus petit, il ajouta, les mains dans les poches :

-Et le Père Noël... Qui lui fait des cadeaux ?

Les garçons éclatèrent d'un rire sonore :

-Que tu es bête ! Le Père Noël est bien trop vieux pour recevoir des cadeaux !

Cet enfant était loin d'être stupide. Oui, qui pensait à faire des cadeaux au Père Noël ? Personne.

Je poursuivis ma route, songeuse. Un rayon de soleil se posa un instant sur ma joue et me réchauffa le cœur... Je poussai un cri de joie : Je tenais une idée de cadeau !

Là, où habitait le Père Noël, le soleil s'absentait souvent. Il me suffirait de le capturer pour l'offrir en présent au vieil ami des enfants.

Attraper le soleil, ne fut pas chose aisée. Je dus m'y reprendre à plusieurs fois. Après plusieurs tentatives, plusieurs coups de baguette magique, je parvins à le faire entrer dans un pot en verre. Puis je serrai ensuite fortement le couvercle.

La nuit tomba d'un coup. Mais qu'importait ! Je voletai, joyeuse, en direction de la Finlande. Quand je parvins au domaine de « L'enfant roi », la résidence du célèbre bonhomme rouge, celui-ci s'apprêtait à partir.

Ses rennes attelés, il grommelait en montant dans son traîneau :

-Curieux ! La nuit est tombée bien vite, aujourd'hui !  Où est passé ce maudit soleil ?

Intimidée, je m'approchai et lui tendis mon cadeau. Etonné, il entreprit de l'ouvrir avec un grand sourire.

-Ma chère petite...

Son sourire s'élargit quand il découvrit, au milieu des papiers de soie, la boule de feu.

-Ah, je comprends tout ! C'est toi, coquine, qui as fait disparaître le soleil !

Il dévissa le couvercle et laissa s'échapper le bel astre.

-Sweet, je suis heureux que tu aies pensé à moi. Je te remercie.

Mais je n'ai nul besoin de cadeau... Seule la joie des enfants, chaque année, fait mon bonheur. Et le soleil ne peut vivre qu'en liberté...

Je fus sur le point de pleurer. J'avais été bien sotte, comme d'habitude.

Le Père Noël me tendit la main :

-Allez, monte ! Ce soir, tu m'accompagnes !

Je séchai immédiatement mes larmes pour grimper à ses côtés, ravie.

Il donna le signal du départ à ses rennes :

-Tchââ ! Fougueux, Danseur, Fringant, Mégère, Comète, Cupidon, Tonnerre, Eclair ! Allons-y !

Cette nuit-là, je devins l'amie du Père Noël. Une nuit magique, croyez-moi !

Et si je ne craignais pas de me montrer trop bavarde, j'aurais de belles histoires à vous conter...   



                                    JOYEUX NOEL ! 




bellparole

Ce qui rend les amitiés indissolubles et double leur charme est un sentiment qui manque à l'amour : la certitude.

(Honoré de Balzac)

bunni

#543

Noël aux quatre coins du monde

Il était une fois, en Finlande, un joli petit village qui se nomme Noëlville. Ce n'est pas un village ordinaire. En effet, ici, les personnes y résidant sont des familles de lutins. Et il y en a de tous genres, comme les humains : des adultes, des plus vieux, des enfants, des bébés, hommes et femmes. Ils se sont tous installés dans ce village pour rendre service à un vieil homme et pour que tous les enfants du monde soient heureux, un peu grâce à eux. Ils vivent tous en paix et en harmonie, heureux et gais, jour après jour. Leurs habitations, magnifiquement décorées et lumineuses, forment un cercle autour d'une maison centrale, aux nombreuses couleurs. Elle est recouverte de paillettes, étincelantes de mille feux, et de dessins en tout genre : des sapins, des étoiles, des branches de houx, et encore bien d'autres. Mais à qui donc appartient cette maison si grande et si belle ? Elle appartient à un vieil homme, à qui on ne donnerait pas d'âge, avec une grande barbe blanche tombant jusqu'au ventre, assez rebondi d'ailleurs. Il est célèbre dans le monde entier et les enfants l'appellent le Père Noël. Au bout du village, on peut apercevoir un grand établissement multicolore. Il s'agit de l'atelier du Père Noël et de ses petits lutins. En effet, c'est à l'intérieur de celui-ci que, durant toute l'année, tout le monde s'active à la fabrication des jouets. Et chaque année, il faut que tout soit prêt pour la veille de Noël. Lors des derniers jours d'ailleurs, l'atelier est semblable à une gigantesque fourmilière. Il faut emballer les derniers cadeaux et les charger dans le traîneau. Mais généralement, chaque année, tout est prêt à l'heure.
En ce soir du 24 décembre 2013, le Père Noël s'agite dans sa chambre car il cherche ses vêtements en mettant toute la pièce sans dessus dessous. Mais heureusement que la Mère Noël est présente à ses côtés pour retrouver tout ce que son mari perd.
- "Je vais être en retard pour ma tournée !"
- "Mais non ! Chaque année, c'est la même chose et tu sais bien qu'au bout du compte, tout se finit très bien !"
- "Oui, mais où sont mes chaussettes ?"
- "Sur ton lit !"
- "Et mes bottes ?"
- "Sous ton lit !"
- "Elles sont cirées au moins ?"
- "Mais oui ! Je l'ai fait ce matin", répond-t-elle, patiente.
Le Père Noël est très agité, mais finalement, au bout de vingt minutes, il est enfin prêt. Il se regarde dans la glace et demande à sa femme :
- "Comment me trouves-tu ?"
- "Magnifique, comme d'habitude !"
Il se passe un dernier coup de peigne sur ses cheveux blancs mais soyeux et met son bonnet rouge au pompon blanc. Le vieil homme fait un bisou à la Mère Noël et se dirige vers les écuries, en prenant bien soin de ne pas oublier sa hotte remplie de cadeaux. Puis, il ouvre les portes de l'immense grange. A l'intérieur de celle-ci, se trouvent sept magnifiques rennes. Les lutins viennent à l'instant de terminer de les brosser, pour que eux aussi soient beaux en ce soir de fête. Le Père Noël attache Rodolphe de sorte qu'il soit à la tête de l'attelage. C'est un lutin qui l'a trouvé dans la forêt, deux mois auparavant. C'est un renne étrange avec un nez rouge. Le Père Noël sait que Rodolphe va beaucoup l'aider. En effet, il doit affronter des conditions météorologiques si mauvaises qu'il risque d'être en retard dans ses livraisons nocturnes. Mais grâce au nez lumineux de ce renne, il peut s'orienter plus facilement dans la turbulence hivernale et mener à bien sa distribution de cadeaux. Ensuite, derrière Rodolphe, il place Dasher et Dancer, puis Prancer et Vixen. Vient ensuite le tour d'atteler Comet et Cupid, et finalement, en dernier, Dunder et Blixen. C'est la première fois que le jeune Rodolphe va participer à la distribution des cadeaux dans tous les pays du monde, et le renne est un peu angoissé. Les autres animaux s'impatientent car, pour eux, la veille de Noël est symbole de joie et d'extase. Enfin ils vont se dégourdir les pattes et voler toute la nuit durant. Le Père Noël dépose sa hotte dans le traîneau, rempli à ras bord de cadeaux. Puis, il s'installe. Tous les lutins, générations confondues ainsi que la Mère Noël se trouvent sur la grande place de décollage et un des petits êtres demande au vieil homme :
- "Père Noël, êtes-vous certain de vous souvenir de la route ?"
- "Judicieuse question", s'exclame la Mère Noël avec un air malicieux.
- "Moi non", répond-il, "mais eux, oui ", dit-il en désignant du doigt ses chers rennes.
Puis, tout le monde lui souhaite de faire une bonne route. Les flocons de neige commencent à tomber. La distribution de surprises peut débuter ! Le Père Noël s'envole au-dessus des toits et des cheminées qui crachent d'épaisses fumées blanches.
Arrivés dans la capitale de la Finlande, Helsinki, les rennes freinent tout en douceur pour lancer des cadeaux dans les cheminées. Mais, tout à coup, les animaux stoppent brutalement pour laisser passer une chouette et son bébé qui est en train d'apprendre à voler. Seulement, cet incident provoque la chute de la hotte. Rodolphe, ayant compris le problème, se pose immédiatement dans un champ. Le Père Noël descend du traîneau et se met à chercher le précieux sac. Soudain, il s'arrête net. Face à lui, se trouve un jeune garçon d'une dizaine d'années. Et il se trouve juste à côté de la hotte. Le vieil homme s'exclame :
- "Oh ! Merci, jeune homme ! Tu as retrouvé mon sac. Je peux dire que tu m'as sauvé la vie ! Que puis-je te donner en remerciement ?"
Le Père Noël se gratte la tête, et tout à coup, il a une idée.
- "Comment t'appelles-tu ?"
- "Yrjö !"
- "Alors, Yrjö, veux-tu venir dans mon traîneau pour m'accompagner dans ma tournée ?"
- "Oh oui, Père Noël, oui", s'exclame l'enfant, fou de joie.
Alors, il monte dans le beau traîneau en bois, et ils s'envolent ensemble. Yrjö demande :
- "Où va-t-on, Père Noël ?"
- "Et bien tous les enfants finlandais ont eu leurs cadeaux, alors maintenant, nous allons en Pologne."
- "Waouh", lance-t-il, émerveillé.
Dans les rues de Varsovie, le vieil homme découvre un garçon qui court pieds nus. Intrigué, il saute de son traîneau pour atterrir sur le toit d'une maison, et il dit au jeune finlandais :
- "Tu es un grand bonhomme de dix ans, alors je te confie la distribution de cadeaux dans les maisons. Je te rejoindrai bientôt, d'accord ?"
- "C'est compris ! Tu peux avoir confiance en moi !"
Le Père Noël se met à rattraper le petit et après quelques minutes de course, il attrape l'enfant par la main.
- "Bonsoir", dit-il.
- "Père Noël ? C'est vraiment toi ? Ou est-ce quelqu'un qui s'est déguisé ?"
- "C'est vraiment moi ! Tu peux tirer sur ma barbe et tu verras qu'elle est bien réelle !"
Aussitôt dit, aussitôt fait. Il tire sur la barbe et constate :
- "Ce n'est pas une blague alors ! Moi je m'appelle Samuel et j'ai cinq ans."
- "Pourquoi tu courrais ? Où allais-tu comme ça ?"
- "Je ne sais pas où j'allais mais quand je suis triste, je cours pour oublier."
- "Et pourquoi tu es triste ? Ce soir, pourtant, c'est magique !"
- "Oui, mais mon grand frère que je n'aime pas beaucoup m'a dit que tu n'existais pas. Et que c'étaient que les bébés qui croyaient en toi."
- "Mais tu n'es plus un bébé et j'existe réellement ! Et tu pourras lui dire qu'il s'est trompé à mon sujet !"
- "Oh non ! Il arrive et moi, je ne veux pas passer le réveillon de Noël avec lui parce qu'il est méchant."
- "Et avec qui veux-tu passer cette soirée alors ?"
- "Avec toi ! C'est possible ?"
- "D'accord !"
Il prend donc Samuel dans ses bras et ils rejoignent le traîneau où les attend Yrjö.
- "Excuse-moi pour le retard, Yrjö, mais je viens t'amener un nouveau copain. Je te présente Samuel et il va faire la suite de la tournée avec nous. Au fait, la distribution de cadeaux s'est-elle bien passée ?"
- "Oui, j'ai tout fait comme il faut !"
Les rennes hochent la tête en signe de confirmation. Puis ils s'envolent dans la minute suivante en Allemagne.
Le Père Noël, Yrjö et Samuel peuvent maintenant admirer les mille couleurs du Noël de Berlin. Et ils constatent que c'est la fête en-dessous d'eux. En effet, ils entendent des cris de joie et des rires. Les hommes jouent de la musique pendant que les enfants dansent en faisant des rondes. Quant aux femmes, elles gèrent le banquet et donnent à manger à ceux qui le leur demandent. Au milieu de cette effervescence nocturne, Samuel, du haut du ciel, remarque qu'un jeune garçon ne se mêle pas aux jeux des autres enfants.
- "Père Noël", demande alors le petit garçon, "pourquoi il est tout seul l'enfant là-bas ?"
- "Je ne sais pas du tout ! Mais je pense qu'une petite promenade en traîneau lui ferait le plus grand bien."
Samuel et Yrjö se penchent pour mieux observer le petit inconnu. Alors, le Père Noël leur dit :
- "Allez voir ce garçon et persuadez-le de monter avec nous. Vous étiez comme lui des petits garçons tristes avant de me rencontrer, alors il vous écoutera et vous suivra certainement."
- "D'accord, Père Noël !"
Alors, les deux petits, une fois arrivés sur le sol, se dirigent vers le jeune garçon. Samuel est le premier à lui demander :
- "Bonsoir ! Pourquoi tu es tout seul ?"
- "Parce que je suis malheureux."
- "Et pourquoi tu es malheureux ?"
- "Parce que mon papa et ma maman, ils ne m'aiment pas. Depuis que ma petite sœur est née, ils ne s'occupent plus de moi."
Yrjö coupe la conversation en demandant :
- "Veux-tu venir avec nous dans le traîneau du Père Noël qui nous attend un peu plus loin ?"
Le petit garçon ouvre grand ses yeux et ses larmes disparaissent tout d'un coup.
- "Il est avec vous ? Je peux vraiment le voir ?"
- "Oui", répondent les deux autres en chœur.
Alors ils l'entraînent vers le Père Noël et le vieux monsieur lui dit :
- "Bonsoir, toi ! Comment t'appelles-tu et quel âge as-tu ?"
- "Je m'appelle Hans et j'ai six ans et demi. Bientôt sept ! C'est vrai que je vais pouvoir faire une promenade avec toi, Yrjö et Samuel ?"
- "Mais oui ! Allez, montez les enfants ! Nous allons finir notre tournée dans ce pays et ensuite, direction Paris, en France."
Et les rennes guidés par Rodolphe, reprennent leur chemin, sur lequel le Père Noël lance des cadeaux dans les cheminées, quasiment sans s'arrêter. Puis, au bout un moment de traîneau magique, ils peuvent enfin apercevoir Paris et sa Tour Eiffel. En la voyant, Hans et Samuel s'exclament en même temps :
- "La dame de fer !"
Et ils contemplent la belle ville lumineuse, émerveillés par ce spectacle féerique. Les rennes se chuchotent quelques phrases et prennent la décision de faire le tour du monument pour le plus grand bonheur des enfants qui rient, joyeux. Les rennes continuent à tourner. Soudain, le traîneau est déstabilisé à cause de quelque chose qui vient de tomber dedans. Alors les animaux conducteurs du chariot se posent sur le champ de Mars. Le Père Noël s'énerve :
- "Quelle est cette chose qui a failli faire chuter mon beau traîneau tout neuf ?"
La chose est tombée tout droit dans la hotte du vieil homme. Et tout à coup, il voit sortir de celle-ci une petite fille d'environ huit ans qui est toute gênée. Ahuri, le Père Noël demande :
- "Mais que fais-tu ici, petite enfant ? Et qui es-tu ?"
- "Je m'appelle Sabrina et je suis désolée si j'ai fait chavirer ton traîneau."
- "Et d'où es-tu tombée, Sabrina ?"
- "De la Tour Eiffel."
Le Père Noël fronce les sourcils, comme pour recevoir un peu plus d'explications, ce que la petite fille s'empresse de lui donner.
- "Ma maman m'a raconté que le soir de Noël, on pouvait t'apercevoir, mais seulement, si on se trouvait très haut. Alors, je suis montée sur la Tour Eiffel et lorsque j'étais au sommet, j'ai eu le vertige et je suis tombée."
L'homme en rouge sourit et prend l'enfant dans son traîneau, puis ils partent. Sabrina demande :
- "Mais Père Noël, tu ne me ramènes pas chez moi ?"
- "Et bien non !"
- "Et pourquoi ? Où va-t-on ?"
- "Tu ne vois pas d'inconvénients à ce que je finisse ma tournée de cadeaux en France, et qu'ensuite, nous allions ensemble en Espagne ?"
- "Oh, Père Noël, je suis tout à fait d'accord !"
- "Mais d'abord, nous allons passer dans un petit appartement, dans le village de Monteux."
- "Pourquoi ?", demande Sabrina.
- "Parce que cette année, j'ai reçu une très jolie lettre d'une petite fille âgée d'un an. Elle s'appelle Emma et elle mérite d'avoir plein de cadeaux !"
Après être passés chez Emma, ils se dirigent vers Madrid. Arrivés là-bas, les enfants et le Père Noël atterrissent. Le vieil homme entre dans la cheminée d'une petite maison et s'engage dans le salon. Il remarque que le sapin brille de mille feux. Il pose les cadeaux commandés au pied de l'arbre. Il trouve sur la petite table basse de bois, trois galettes et une tasse de thé. Alors, il mange et boit un peu. Mais au moment où il s'apprête à partir, une petite voix le fait sursauter :
- "C'était bon, Père Noël ?"
Il se retourne et voit un enfant qui se présente :
- "Moi, je m'appelle Julio et j'ai sept ans. Et toi, quel âge as-tu ?"
- "Oh moi, je suis très vieux !"
- "Ah bon ? On ne dirait pas pourtant !"
- "Merci ! Mais que fais-tu debout à cette heure-ci ?"
- "Et bien, je voulais te voir. Et j'ai aperçu des enfants dans ton traîneau. Comment ont-ils fait ?"
- "Ils m'ont demandé de venir avec moi."
- "Alors, moi aussi je peux !"
- "Bien sûr ! Allez, suis-moi !"
Et le Père Noël emmène Julio jusqu'au traîneau, où le jeune garçon fait connaissance avec les autres enfants des différents pays.
Puis, ils s'envolent en direction de l'Italie. Le vieil homme continue sa distribution de cadeaux tandis que les enfants, les yeux étincelants, admirent le paysage. La neige tombe toujours aussi fortement mais le nez lumineux de Rodolphe les aide beaucoup à s'orienter. Dancer demande au jeune renne en tête :
- "Alors Rodolphe, ça va ? Tu t'en sors ?"
- "Je crois que oui. Vous trouvez que je me débrouille bien ?"
- "Oh oui, sans aucun doute !", s'exclame Blixen.
- "Moi, je trouve que pour le moment, ta première tournée est une réussite !", ajoute Comet.
Alors Rodolphe est heureux et redouble de vitesse. Dans les rues de Rome, les surprises volent jusqu'aux cheminées. Mais dans une ruelle sombre, le Père Noël est attiré par un petit arbre dégarni. Alors, il y descend et au beau milieu des cartons qui jonchent le sol, il aperçoit une petite fille frigorifiée et se rend compte que l'arbre dégarni est son sapin de Noël. Il prend dans ses bras la fillette qui dort et arrivé au traîneau, il l'enveloppe dans une couverture pour qu'elle puisse se réchauffer. Alors que le chariot reprend se route vers le Royaume-Uni, la petite italienne se réveille :
- "Où suis-je ?"
- "Dans le traîneau du Père Noël", lui répond Yrjö.
- "Ne t'inquiète pas, nous sommes tes amis", rajoute Sabrina en la serrant fort contre elle. "Comment tu t'appelles ?"
- "Moi, c'est Tina et je crois que j'ai six ans."
- "Que faisais-tu dehors ?", lui demande le Père Noël.
- "Et bien, je vis dehors. Ma maison, ce sont mes cartons mais je suis tellement heureuse que tu aies trouvé mon arbre de Noël. Je ne sais pas pourquoi mais je savais que tu viendrais me voir, même si je vis dans la rue."
- "Mais où sont tes parents ?", interroge Samuel.
- "Je n'ai pas de parents. Je vivais dans une autre famille que la mienne et je suis partie car ils étaient trop méchants avec moi."
Tout le monde reste muet mais le Père Noël reprend la parole :
- "Écoute Tina, ce soir est un soir de fête alors je veux que tous les enfants oublient leurs problèmes et que tout le monde soit heureux."
- "D'accord !", s'exclament Tina et les autres enfants.

bunni

Noël aux quatre coins du monde  (suite)

- "Regardez les petits, nous arrivons à Londres !"
Les cadeaux pleuvent de plus belle sous les paroles du Père Noël :
- "Des surprises pour les enfants Douglas, des jouets pour les MacLand..."
Soudain, le traîneau stoppe net au beau milieu du ciel. Intrigué et inquiet, le vieil homme demande :
- "Ola, les rennes ! Que se passe-t-il ?"
- "C'est Prancer qui vient de se faire mal à la patte", explique Vixen.
Alors ils se posent sur le sol londonien. Tandis que le Père Noël soigne le pauvre renne, Neville, un petit anglais de six ans s'introduit dans le chariot. Étonnés, les autres enfants l'assomment de questions. Yrjö demande :
- "Qui es-tu ?"
- "Neville."
- "Tu viens de ce pays ?", interroge Samuel.
- "Ben oui !"
- "Il fait toujours aussi froid ici ?", questionne Sabrina.
- "Presque toujours mais quelquefois, il fait chaud aussi !"
- "Tu habites ici depuis longtemps ?", demande Julio.
- "Je ne sais pas."
- "Tu ne sais pas ? Tu sais compter pourtant !", s'exclame Hans, étonné.
- "Oui mais je crois que je n'ai pas assez de doigts pour calculer."
Les enfants se mettent à rire.
Puis le Père Noël se réinstalle dans le siège du traîneau, se tourne vers les enfants et constate :
- "Je vois que vous êtes bien joyeux, alors, on peut repartir !"
- "Tu es le vrai Père Noël, toi ?", questionne Neville.
- "Tiens, voilà un nouvel enfant !", s'exclame l'homme en rouge. "Comment te nommes-tu, petit ?"
- "Il s'appelle Neville et il a six ans", répondent les autres enfants en chœur à la place du petit Anglais.
- "Et bien, je vois que vous avez déjà fait connaissance. Très bien ! Et bien bonsoir et bienvenue à bord du traîneau du Père Noël. Notre prochaine destination est le Groenland."
Alors que le chariot magique survole l'océan Atlantique, le Père Noël ordonne à ses enfants :
- "Les petits, vous trouverez dans la grande malle à votre droite des pulls en laine. Alors prenez-les et couvrez-vous bien car nous arrivons dans un pays très froid où les maîtres de ce monde sont les pingouins, les phoques et les ours polaires !"
Sur les conseils du Père Noël, ils s'habillent plus chaudement et ils arrivent sur les terres enneigées et les océans de glace. Tout est blanc, pur et beau. C'est la première fois que Julio, le petit espagnol, voit de la neige et il est tout émerveillé.
- "Que c'est beau ! Que c'est beau !", ne cessent de répéter les enfants.
- "Oh, il y a un troupeau de pingouins sur la banquise", remarque Sabrina.
- "Et il y en a même un qui se noie," constate le garçon finlandais.
- "Voyons Yrjö", réplique le Père Noël, "les pingouins savent nager !"
- "Oui mais il y a quand même quelque chose qui se débat dans l'eau," montre Samuel.
- "Rodolphe, pose-nous à terre ! Il me semble qu'il s'agit d'un enfant."
- "Mais", proteste Dasher, "la neige est trop fine à cet endroit, et il y a peu de glace. Nous risquerions de couler nous aussi."
- "Je sais ce que nous pouvons faire, propose Hans, nous allons faire du rase-motte sur l'eau et les deux enfants les plus âgés, c'est-à-dire Yrjö et Sabrina vont attraper l'enfant".
Le plan est mis à exécution et ils peuvent enfin repêcher le tout petit garçon. Le Père Noël décide qu'il ferait le reste du voyage avec eux. Julio enveloppe l'enfant dans une grande couverture laineuse. Le petit tousse un peu, et Sabrina, telle une petite maman, s'occupe de lui et lui pose quelques questions.
- "Comment t'appelles-tu, petit garçon ?"
- "Inouk."
- "Inouk ?", répète-t-elle.
- "Oui."
- "Et tu sais quel âge tu as ?"
Sur cette question, l'enfant déplie trois de ses doigts : le pouce, l'index et le majeur. Il a donc trois ans, et c'est le plus jeune des huit enfants. Par la suite, Neville se plaint :
- "Il fait très froid ici ! On ne peut pas aller ailleurs ?"
- "Et bien, l'avantage du Groenland", répond le Père Noël, "c'est qu'il y a très peu d'habitations. Je finis ma distribution et après nous irons dans un autre pays."

Finalement, ils se dirigent vers le Canada et le vieil homme dit :
- "Nous allons à Montréal."
- "Mais il fait froid aussi là-bas", constate Julio.
- "Oui, mais beaucoup moins qu'au Groenland en tout cas", rétorque Yrjö. Le traîneau doit se poser dans cette ville à cause de Cupid qui a attrapé un gros rhume lors de leur passage chez les pingouins.
A Montréal, il y a la fête foraine mais le Père Noël a ordonné aux enfants de rester dans le traîneau. Une si belle fête dans une ville si étincelante, Inouk n'en a jamais vu, lui qui vient du pays de la glace et de la banquise. Alors discrètement, il sort du chariot et se faufile entre les gens. Il marche droit devant lui mais finit par se perdre parmi tous ces adultes. Lorsqu'il se rend compte qu'il ne sait plus où il est, il s'assoit à côté des auto-tamponneuses et se met à pleurer. Les gens qui rient passent à côté de lui, sans même se rendre compte de sa présence. Mais heureusement que Lara le remarque. Elle s'accroupit près de lui et lui demande :
- "Pourquoi tu pleures ?"
- "Parce que je me suis perdu."
- "Où sont tes parents ?"
- "Au Groenland. Moi, je suis avec le Père Noël."
- "Le Père Noël ? Je suis passée à côté de lui, il y a quelques minutes. Il y a un traîneau et plein d'enfants dedans, n'est-ce pas ?"
- "Oui, oui !"
- "Allez, donne-moi la main, je vais te raccompagner jusqu'à lui."
La jeune canadienne se faufile entre toutes ces personnes, et finalement, elle le ramène jusqu'au Père Noël, qui s'exclame en le voyant :
- "Inouk ! Mais où étais-tu passé ? Nous te cherchions de partout !"
- "Je me suis perdu. C'est elle qui m'a aidé", dit-il, en désignant Lara.
- "Bonsoir", dit le Père Noël.
- "Bonsoir !"
- "Heureusement que tu étais là ma petite..."
- "Lara ! Mon nom est Lara et j'ai neuf ans."
- "Alors, Lara, je pense que si tu n'avais pas été présente, je pense que je n'aurais pas pu le retrouver. Il me cause bien des problèmes, ce jeune Inouk !"
Évidemment, le Père Noël plaisante. Lara compte bien faire partie du voyage et le vieil homme l'invite à monter à bord. Puis ils partent en direction de New York. Alors que la joyeuse troupe frôle l'immeuble le plus haut de la ville, l'Empire State Building, ils voient une fillette d'environ sept ans, Kate, qui est sur la fenêtre du plus haut étage. Entre temps, le traîneau passe à côté d'elle. La petite, surprise, trébuche, mais heureusement, elle atterrit sur le dos de Rodolphe. L'homme en rouge l'attrape, et, intrigué, il demande à Kate :
- "Que faisais-tu, tout là-haut ?"
- "C'est à cause de mon chat. Il était sur la fenêtre, et moi, je voulais le récupérer. Mais lui, il s'amusait. Et quand le traîneau est arrivé, il est rentré car il a eu peur, et moi, je suis tombée. Je m'appelle Kate et j'aurai huit ans dans onze mois."
Le Père Noël sourit et l'emmène avec eux.
Après la distribution des jouets aux Etats-Unis, ils se dirigent au Pérou, à Lima. Cette nuit-là, le vent souffle très violemment et Louisa, une pauvre petite orpheline de cinq ans ne dort pas. Elle se promène non loin de l'auberge que tiennent ses parents adoptifs, avec son lama de deux mois, Flopito. Elle a mal aux yeux et elle a froid. Soudain, une incroyable rafale lui arrache son bonnet et va se poser sur celui du Père Noël. Alors, le traîneau se pose aux côtés de Louisa et le vieil homme s'approche d'elle, en lui tendant gentiment son bonnet.
- "Bonsoir, chère petite ! Je crois que cela t'appartient !"
- "Oh, merci beaucoup ! Tu es gentil, Père Noël !"
- "Mais qui es-tu et d'où viens-tu ?"
- "Je m'appelle Louisa, j'ai cinq ans et j'habite l'auberge là-bas."
- "Avec tes parents ?"
- "Ce ne sont pas vraiment mes parents. Ils disent qu'ils m'ont trouvé devant leur porte quand j'étais bébé."
- "Ah bon ?"
- "Ils sont gentils mais je suis triste car ils ne veulent pas fêter Noël, même si je sais que je n'aurais pas eu de cadeaux."
- "Moi, je vais te faire une belle surprise Louisa. Veux-tu venir avec nous en Australie ?"
- "Oh oui, Père Noël ! Je serais très heureuse !"
Alors, encore un nouvel enfant monte à bord, et tandis que les autres font connaissance avec la petite péruvienne, le traîneau atteint petit à petit Sydney. Le soleil se couche sur les plaines où sautent des centaines de kangourous. Le Père Noël distribue ses cadeaux, mais par un lancer mal visé, une surprise tombe au sol. Il décide alors d'atterrir mais les rennes ne parviennent pas à freiner et tout l'équipage glisse sur la terre et les quelques herbes qui jonchent le sol. Soudain, le chariot percute une chose, ce qui freine définitivement Rodolphe et les autres rennes. Yrjö et Lara sautent du traîneau pour savoir ce qu'ils ont percuté. Lara pousse un cri. Il s'agit d'un petit garçon. Il est habillé pauvrement mais une jolie gourmette en or orne son petit poignet. Dessus, il est écrit : "Cody- 15 juin 2002". Ce petit bonhomme a alors un peu plus de trois ans. Heureusement, le choc ne l'a pas gravement blessé mais une écorchure au genou saigne un petit peu. Le Père Noël, bon médecin, lui colle un pansement et l'emmène dans son traîneau. Le petit est encore inconscient mais le vieux monsieur a un bon plan.
Après la distribution de jouets aux enfants australiens, il est certain que le bon air des Indes va faire du bien au petit garçon. Et c'est ainsi qu'ils se retrouvent tous à New Delhi. Il fait nuit, mais pourtant la ville est bercée par un doux air de musique. Malheureusement, ni l'air si agréable, ni les bonnes odeurs de la ville ne font effet sur le jeune Cody, et le vieil homme est désespéré. Le petit Samuel demande, les yeux écarquillés :
- "Mais tu pleures, Père Noël ?"
- "Presque, mon petit."
- "Mais pourquoi ?", interroge Sabrina.
- "Parce que notre ami australien n'a pas rouvert les yeux depuis que je l'ai fait chuté. C'est une bien triste nuit de Noël", se lamente-t-il.
Cachée derrière un muret, une petite fille indienne de neuf ans entend tout. Alors, elle décide de s'approcher de l'homme en rouge et commence à lui expliquer :
- "Moi, je connais des plantes qui ont la vertu de réveiller les gens."
Le Père Noël relève la tête, une lueur d'espoir dans les yeux. La fillette se présente :
- "Je m'appelle Botum Ponu et je suis une des descendantes d'une famille de magiciens-sorciers. Ma mère m'a appris le nom des plantes médicinales et comment s'en servir."
- "Tu peux nous aider, alors ?", demande Yrjö.
- "Je pense que oui. Attendez-moi ici, je n'en ai que pour quelques minutes."
Lorsqu'elle revient, un instant plus tard, tous s'aperçoivent qu'elle tient dans ses mains de grandes et belles plantes vertes. Elle s'agenouille à côté de Cody qu'on a allongé à même le sol. La fillette frotte ses mains sur les herbes magiques et se met à frictionner le torse du petit garçon. Celui-ci, au bout d'un moment, pousse un soupir, puis se met à remuer ses petites mains. Enfin, il ouvre les yeux mais ne parait pas étonné de se retrouver face au Père Noël. Lorsqu'il parvient à se relever, il lui saute quand même au cou, en le remerciant :
- "Merci, Père Noël ! Merci ! Tu m'as réveillé !"
- "Ce n'est pas moi que tu dois remercier, petit Cody mais plutôt cette jeune indienne. Sans elle, je ne sais pas ce que j'aurais fait."
Alors, l'enfant se tourne vers sa guérisseuse et lui demande :
- "Comment tu t'appelles ?"
- "Moi, c'est Botum Ponu."
- "Merci beaucoup de m'avoir réveillé, Botum Ponu."
Et Cody embrasse très fort la jeune indienne. Bien sûr, le Père Noël, pour la remercier de son geste, l'invite à monter à bord de son traîneau et elle accepte sans aucune hésitation.
Puis après la tournée de cadeaux en Inde, ils recommencent tous ensemble à parcourir les airs. Le traîneau, tel un bel oiseau léger, fait route vers la Chine. Et c'est à Pékin que le Père Noël rencontre la quatorzième enfant qui va faire le reste du voyage avec eux. Elle s'appelle Yukiko et est âgée de huit ans. Elle a treize frères et sœurs, et ses parents, de très modestes pêcheurs, ont élu domicile avec leurs enfants dans un petit bateau. Ils ne s'occupent guère de Yukiko, oubliant souvent de lui donner à manger. Cette nuit-là, l'enfant a très faim, et ne trouve rien de mieux pour se rassasier que de voler quelques fruits dans l'étalage que tient un vieux marchand hargneux. Yukiko s'empare de deux, trois pommes, les cache dans sa poche, et mine de rien, s'en va vers les rues adjacentes de l'avenue principale. Mais le marchand, ayant remarqué le vol, commence à hurler :
- "Au voleur ! Au voleur !"
Des gens se mettent alors à courir derrière la pauvre chinoise.
Ses jambes lui font très mal, et elle sent qu'elle va bientôt tomber. Soudain, plusieurs paires de mains s'agrippent à ses bras, et comme par magie, elle se soulève du sol. Sabrina, Lara, Botum Ponu et Yrjö crient au Père Noël :
- "C'est bon, nous la tenons !"
Ainsi, sur la route d'Oulan Bétor, en Mongolie, la fillette se présente :
- "Je m'appelle Yukiko Chang et je vis à Pékin depuis que je suis née."
- "Mais pourquoi tous ces gens te courraient après ?", questionne le Père Noël.
- "Parce que j'ai volé des pommes. Je sais que ce n'est pas bien, mais mes parents sont très pauvres et ils ne nous donnent pas souvent à manger à mes frères, ma sœur et moi."
- "Tu as combien de frères et sœurs ?", demande Sabrina.
- "J'ai douze frères et j'avais une petite sœur mais mes parents l'ont vendue à un couple d'Européens pour avoir un peu d'argent."
- "Les enfants", coupe le Père Noël, "ce soir, c'est la nuit de Noël et j'exige que tout le monde soit heureux. Alors, je veux tous vous entendre chanter !"
Et pendant ce temps, les rennes, toujours guidés par le courageux Rodolphe, atteignent la Mongolie où l'homme en rouge continue de distribuer ses cadeaux sans se lasser. A quelques kilomètres d'Oulan Bator, la capitale, les passagers du traîneau remarquent d'étranges signaux dans un champ. Curieux, le vieux bonhomme demande à son attelage de se poser non loin de la chose lumineuse, qui est en réalité un petit garçon, tenant dans ses mains des torches allumées. Et c'est Louisa qui s'approche en premier de lui. Elle lui dit poliment :
- "Bonsoir, je m'appelle Louisa. Avec mes nouveaux amis, on fait une promenade avec la Père Noël. Comme tu es tout seul, on pensait que tu pourrais venir avec nous. Tu es d'accord ?"
L'enfant sourit et fait plein de gestes avec ses bras. Ses lèvres remuent mais aucun son ne sort. Affolée, la jeune péruvienne avertit immédiatement l'homme en rouge :
- "Père Noël ! L'enfant ne parle pas !"
Alors, il descend du traîneau pour se retrouver en face du petit mongol qui tient dans ses mains un petit carnet de notes et un stylo.
Il écrit : "Kubilaï- 7 ans- mère partie- père méchant".
Alors, le Père Noël semble tout comprendre et résume :
- "Si j'ai bien compris, tu t'appelles Kubilaï, tu as sept ans. Tu es muet depuis que ta mère est partie de chez toi à cause de ton père qui était méchant avec elle."
Un sourire radieux illumine le visage du jeune garçon car pour la première fois depuis la perte de sa parole, quelqu'un le comprend enfin. Puis l'enfant montre successivement lui, le ciel, le Père Noël, la petite troupe, le traîneau et les rennes. Julio comprend et prend la parole :
- "Tu veux venir avec nous dans le ciel avec le traîneau du Père Noël et de ses rennes. C'est ça ?"
Kubilaï hoche la tête de haut en bas. Alors, le vieil homme soulève l'enfant et le dépose à côté des cadeaux restants. Puis, pour finir la nuit, le Père Noël embarque encore dans son chariot quatre autres enfants. En Polynésie, il trouve Tini, un garçon de quatre ans qui tient absolument à rencontrer le Père Noël mais c'est un enfant heureux et sans histoires.
Ensuite, au Maroc, à Rabat, dans un champ de dattes, ils aperçoivent une petite fille qu'ils recueillent. Elle se nomme Zora et elle a dix ans. D'après sa mère, quand elle sera grande, elle deviendra voyante. Le Père Noël lui demande alors qu'elle sera leur prochaine destination et la jeune marocaine répond correctement : "l'Afrique du Sud, dans la ville du Cap".
Là-bas, ils rencontrent Mamadou, qui a huit ans. Ses parents sont très pauvres, alors ils ne fêtent pas Noël et l'enfant africain n'a jamais eu de cadeaux. Enfin, sur le lieu de leur dernière destination, en Grèce, ils font monter avec eux Nikos, un jeune garçon, âgé de cinq ans. Maintenant, le traîneau est plein. Il n'y a plus de cadeaux car la tournée est enfin finie.
Mais aucun des enfants ne sait où il va désormais se rendre. Mais les rennes savent où aller, et s'envolent à travers les étoiles.

bunni

#545
Noël aux quatre coins du monde  (suite et fin )


Le Père Noël demande :
- "Les enfants, vous voulez me faire plaisir ?"
- "Oui", répondent-ils, en chœur.
- "Alors, fermez les yeux ! Je vais vous emmener dans un lieu magique mais il ne faut pas que vous regardiez !"
Evidemment, les enfants sont d'accord et tous cachent leurs yeux avec leurs mains. Puis, au bout d'un moment, ils peuvent enfin regarder. Tous sont émerveillés et ouvrent grand les yeux : ils sont dans le village du Père Noël. Les rennes se posent dans un champ d'étranges fleurs : leurs tiges sont très longues et blanches, et les pétales de la même couleur, avec des fils argentés. On dirait que les fleurs sont passées sous un nuage de paillettes argentées. Botum Ponu, curieuse, demande :
- "Père Noël, je connais toutes les fleurs du monde entier mais je ne reconnais pas cette variété. Qu'est-ce que c'est ?"
- "Ce sont des fleurs qui ne poussent que dans mon village, chaque année, à Noël."
Les enfants sont extrêmement heureux de découvrir l'endroit où vit l'homme le plus apprécié des petits. La Mère Noël est sur le seuil de sa maison, et en voyant son mari qui est de retour, elle court vers lui pour se jeter dans ses bras et elle lui fait un bisou. Tous les enfants sont étonnés :
- "Mais Père Noël", demande Mamadou, "tu as une femme ?"
- "Et bien oui ! Alors, ils sont encore plus enchantés de rencontrer la famille de l'homme en rouge."
- "Et vous avez des enfants ?", interroge Nikos.
- "Oui et non", répond la Mère Noël.
- "En fait", explique son mari, nous n'avons pas eu d'enfants ensemble mais tous les petits du monde entier sont comme nos propres enfants.
- "Alors, on peut t'appeler papa", dit Louisa qui n'a pas connu son père.
- "Ici", répond-t-il, "tout est permis alors tu peux m'appeler comme bon te semble !"
- "Allez les enfants", coupe la Mère Noël, "entrez dans notre maison pour vous réchauffer !"
Et les petits ne se font pas prier. Dans la grande habitation, tous s'assoient et Lara se met à parler :
- "Nous sommes bien ici, Père Noël, mais que faisons-nous maintenant ?"
- "Et bien, vous allez me dire ce que vous désirez pour votre Noël et j'irai fabriquer vos jouets."
Les enfants, enchantés, confient au Père Noël ce qu'ils veulent, et celui-ci se retire dans son atelier, en compagnie de quelques lutins qui vont l'aider dans ses travaux. La petite troupe veut faire une surprise à l'homme en rouge, pour le remercier de tout ce qu'il fait pour eux. Alors, ils se concertent et chacun donne son idée :
- "Nous pouvons danser pour lui", propose Botum Ponu.
- "Et chanter !", s'exclame Cody.
Kubilaï imite quelqu'un qui joue de la flûte et Mamadou traduit :
- "Oui, Kubilaï n'a pas tort ! Nous pouvons jouer de la musique aussi !"
- "Ce serait bien, mais nous n'avons pas d'instruments."
- "Il y a une solution", dit la Mère Noël. "Allez voir les lutins et je suis certaine qu'ils vous prêteront les leurs. Lara et Sabrina, allez-y ! Et pour les autres, si vous le voulez bien, nous pourrions cuisiner les spécialités de vos pays."
- "Oh oui, ce serait une belle surprise pour le Père Noël !", s'exclame Yrjö.
- "Dans ma cuisine, il y a tous les ingrédients qu'il vous faut. Nous allons préparer une sorte de buffet et chacun pourra manger ce qu'il désire quand la fête commencera."
Au terme d'une longue heure, tous les plats sont enfin prêts, et la table du buffet est dressée. Lara et Sabrina sont revenues, les bras chargés d'instruments de musique.
- "Écoutez-nous ! On va vous dire le nom de chaque instrument, et vous répondrez s'il vient de votre pays."
- "D'accord", crient les autres enfants.
- "Alors, le violon, pour qui est-ce ?"
- "Pour moi", répond Hans.
- "Le petit piano ?"
- "A moi !", crie Sabrina, qui distribue aussi les instruments.
Puis elles donnent une guitare à Julio, une cornemuse pour Neville, le banjo à Kate, la flûte de pan à Louisa, une sitar pour Botum Ponu, un petit tambour de feu à Yukiko, un balalaïka pour Kubilaï, et pour Mamadou, un tam-tam. Ils s'entraînent tous un petit moment jusqu'à ce que Inouk, qui fait le guet, les avertit que le Père Noël arrive. Alors, ils lui demandent de fermer les yeux et le conduisent au devant de leur surprise. Chaque enfant se trouve derrière la spécialité de son pays. L'homme en rouge ouvre finalement les yeux et pousse un cri d'émerveillement. Alors, il commence, avec la Mère Noël, à faire le tour de la grande table où chaque enfant explique le nom et les traditions de Noël de son pays. Le premier à commencer est Hans :

- "La spécialité d'Allemagne est un gâteau qui s'appelle kouglof. C'est dans mon pays qu'est née, il y a 400 ans, la tradition du sapin. Dans le nord du pays, on dit que c'est saint Nicolas qui donne les cadeaux le 6 décembre, en descendant du ciel dans sa luge. Mais dans le Sud, c'est toi, le Père Noël et moi, je trouve que c'est mieux ! Joyeux Noël en allemand, ça se dit " Froeliche Weihnachten "."
- "Chez moi, explique à son tour Sabrina, on mange de la dinde et de la bûche de Noël. Tu déposes nos cadeaux dans nos souliers dans la nuit du 24 au 25 décembre. Et on dit " Joyeux Noël "."
- "Et c'est quoi ces petits gâteaux ?", demande l'homme en rouge.
- "Et bien, mon papa est français et ma maman est belge, alors, j'ai aussi fait la spécialité de la Belgique."
- "Et quelle est leur tradition ?"
- "En Belgique, on dit que le 6 décembre, c'est Saint Nicolas qui vient sur son âne chargé de surprises. Près de la cheminée, les enfants déposent un navet et une carotte pour l'âne. Et ces biscuits sont des spéculoos en forme de Saint Nicolas. Ils sont très secs et très sucrés."
- "Merci beaucoup, petite Sabrina ! A toi, Neville, explique-moi tout !

- "En Angleterre, on t'appelle Santa Claus et tu passes dans la nuit du 24 au 25 décembre. Tu déposes nos cadeaux dans des chaussettes, placées au coin du feu. Chez nous, il n'y a pas de Noël sans dinde ni plum-pudding. C'est un gâteau préparé cinq semaines avant Noël pour qu'il vieillisse correctement. Et le soir du 24, il est arrosé de punch, puis flambé ! Donc, j'ai fabriqué ce pudding, mais je ne suis pas certain qu'il soit très bon !"
- "Ce n'est pas grave !"
- "Et en Angleterre, on dit " Merry Christmas "."
- "En Amérique du Nord", explique Kate, "pour terminer le repas de Noël, on mange des cakes aux fruits. Et Joyeux Noël, ça se dit aussi " Merry Christmas "."
- "En Chine", dit à son tour Yukiko, "on mange du riz tous les jours, alors, à Noël aussi ! Mais il y a beaucoup de familles pauvres et le riz coûte assez cher, même s'il est très bon. En chinois, Joyeux Noël se dit " Gun Tso Sun Tan'Gung Haw Sun ". Vous remarquerez que c'est très long à dire !"
- "Au Maroc, continue Zora, Noël n'existe pas mais moi, je le fais secrètement avec mes amis. Et pour l'occasion, on mange pleins de dattes ! Et on dit " Idah Saidan Wa Sanah Jadidah "."
- "Très bien, dit le Père Noël. Et chez toi, Mamadou ?"
- "En Afrique, je ne sais pas si tout le monde fête Noël, mais chez moi, on le fait et on mange de la semoule de mie. Et Joyeux Noël, ça se dit " Een Plesierige Kerfees "."
- "En Espagne, explique Julio, Noël est avant tout une fête religieuse parce qu'on fête la naissance de Jésus. Les adultes disent qu'il n'y a pas de Père Noël, mais moi, je n'y crois pas ! Ce sont les Rois Mages qui viennent le 6 janvier mettre les jouets dans les sabots posés sur les balcons. Et pour le repas, on prépare de la soupe aux amandes. Et en dessert, on mange du turón. C'est un mélange de caramel et d'amandes. Et c'est-ce que j'ai préparé, avec l'aide de la Mère Noël, évidemment. En espagnol, Joyeux Noël se dit " Feliz Navidad "."
- "Hum ! C'est très bon ! Félicitations ! A toi, Tina, dis-moi quelles sont les traditions en Italie ?"
- "Et bien, chez moi, les fêtes de Noël durent trois jours, du 24 au 26 décembre. Mais les cadeaux sont distribués beaucoup plus tard, le 6 janvier. On dit que c'est une vieille dame qui le fait, la dame aux cheveux blancs, la sorcière Befana. Mais il y a beaucoup d'enfants qui disent que c'est le Père Noël qui vient mais qu'il est déguisé. En Italie, on dit " Buone Feste Natalizie ". Et nous, on mange du panneton."
- "Il parait que c'est très bon!"
- "Et bien goûte-le, Père Noël !"
- "En effet, c'est succulent ! Et pour finir, nous avons la Grèce !"
- "Oui, Père Noël, répond Nikos. Pour les Grecs, Noël est moins important que les fêtes de Pâques. On dit qu'il n'y a pas de Père Noël mais que c'est saint Basile qui apporte les cadeaux le 1er janvier. Le soir, les enfants grecs vont chanter chez les voisins et en échange, ils reçoivent des friandises. En voilà quelques unes. Mais moi, je savais que tu existes, et ce soir, j'en ai même la preuve ! Et Joyeux Noël en grec, c'est " Kala Christouyenna "."
- "Merci beaucoup, mes enfants, je suis fier de vous !"
Et pour continuer la surprise, certains petits jouent de la musique avec les instruments des lutins, tandis que d'autres dansent comme des fous. Certains encore font des va-et-vient entre les deux extrémités du banquet, ne sachant que choisir pour manger, tant que tout est si bon. Puis, au bout d'un moment, ils décident de se reposer et ils s'assoient tous en rond. Maintenant que les enfants se connaissent tous, ils se rendent bien vite compte qu'ils ne savent rien des pays respectifs de leurs amis. Alors, ils se mettent à parler de cela. C'est le jeune finlandais Yrjö qui commence :
- "Mon pays, il est très grand ! L'hiver, lorsqu'il y a de la neige, on peut apercevoir des rennes et ils ressemblent d'ailleurs beaucoup à ceux du Père Noël. Et en Finlande, Joyeux Noël se dit " Iloista Joulua "."
- "En Pologne", explique Samuel, "il y a quelque chose que j'aime énormément. Ce sont des montagnards qui portent encore leurs gilets de laine brodés lorsqu'ils descendent le foin des hautes prairies dans leurs barques. Ils vont très vite car le courant de la Dunajec est rapide. En plus, c'est le métier de mon papa ! Et nous, on dit " Weselych Swiat "."
- "En Allemagne, continue Hans, des gens ont construits le mur de Berlin et le peuple l'a détruit en 1989."
- "Quand a-t-il été construit ?", demande Botum Ponu.
- "Je ne sais pas, ma maman ne me l'a pas dit ! Et toi Sabrina, qu'y a-t-il dans ton pays ?"
- "Il y a la tour Eiffel. Elle se trouve à Paris. C'est une gigantesque tour d'acier, très haute. Et c'est Monsieur Eiffel qui l'a construite pour une exposition."

- "Chez moi aussi, il y une tour", dit Tina. "C'est la tour de Pise, mais je ne sais pas en quoi elle est faite !"
Puis, Julio prend la parole :
-" En Espagne, il y a beaucoup de vignobles qui donnent de très bons vins."
- "En Angleterre", explique Neville, "nous avons le London Bridge, un des nombreux ponts qui sert à traverser la Tamise. Et il se soulève pour laisser passer les gros bateaux. Mais il y a aussi Big Ben qui est une grosse horloge !"
- "Chez moi, assure Inouk, il existe des animaux que vous ne pourrez pas trouver chez vous. Sur la banquise, on voit des manchots, des pingouins, des ours polaires et des phoques aussi. Et dans mon pays, Joyeux Noël se dit " Jutdlime Pivdluarit Ukiortame Pivdluaritlo ". C'est long à prononcer !"
- "Au Canada, s'exclame Lara, il y a beaucoup de lacs, de forêts, et surtout de gros ours bruns."
- "A New York, se trouve la Statue de la Liberté qui est immense. Il y a aussi des immeubles très hauts qu'on appelle des buildings. Et puis, il y a aussi beaucoup de stars qui travaillent à Hollywood."
- "Au Pérou", dit Louisa, "on a énormément de lamas. Beaucoup de familles en possèdent au moins un. Et même moi, j'ai le mien, c'est mon meilleur ami. Les lamas sont des sortes de chevaux avec plein de poils partout !"
- "En Australie, nous n'avons pas de lamas, mais des kangourous et des koalas. Les koalas sont comme des ours mais en plus petits !"
- "En Inde, nous n'avons pas ça mais des tigres du Bengale", confie Botum Ponu. "Ce sont des animaux majestueux mais très dangereux. Il ne vaut mieux pas se retrouver en face d'eux ! Et chez nous, Joyeux noël se dit " Shub Naya Baras "."
Par la suite, Yukiko explique que chez elle, il y a la grande Muraille de Chine. Kubilaï, par des gestes, fait comprendre que dans son pays, existe le train transsibérien et qu'il y a beaucoup de chevaux. Zora parle du grand désert du Sahara et Mamadou raconte les incroyables courses d'autruches. Quant à Tini, il décrit son île comme la plus belle du monde entier. A la fin, ils sont tous aussi émerveillés les uns que les autres. Mais le jour va bientôt se lever et les enfants doivent rejoindre leurs pays respectifs. Mais avant de partir, le Père Noël entame sa distribution de cadeaux qu'il a fabriqué rien que pour eux, sur commande ! Au fur et à mesure, il les appelle et chacun des enfants est enchanté. Mais pour certains, il réserve le meilleur pour la fin. Maintenant, il faut partir, mais tous refusent car ils veulent rester ensembles. Alors, le Père Noël leur promet qu'il reviendra l'année prochaine et que les petits pourront à nouveau se revoir pour décrire les merveilles de leurs pays, une fois de plus.
- "Enfin, mes enfants, je vais vous faire un dernier cadeau à chacun. Je vais faire en sorte que vos familles croient pour toujours en la magie de Noël. Ainsi, Zora, par exemple, tu pourras fêter Noël en famille sans ne plus avoir à te cacher".
- "Merci, Père Noël !"
- "Et puis, pour cinq d'entre vous, vous découvrirez une surprise en rentrant chez vous. Cela concerne Louisa, Tina, Mamadou, Yukiko et Kubilaï. Et maintenant, il faut partir."

Tous les enfants font de gros bisous à la Mère Noël en la remerciant chaleureusement ainsi que les lutins qui les ont accueillis et prêtés leurs instruments de musique. Puis ils montent à bord du traîneau et les rennes, toujours guidés par le vaillant Rodolphe, s'envolent au grand galop, à travers le ciel étoilé. Puis ils s'arrêtent à chaque pays où un des enfants habite. Le Père Noël, une fois tous les petits déposés, retourne chez lui, et s'endort à côté de la Mère Noël, pour un repos bien mérité. La totalité des enfants trouve chez elle, au pied de leur sapin, une multitude de cadeaux. Mais c'est surtout un Noël magique pour cinq d'entre eux comme l'a promis le Père Noël. En effet, Mamadou trouve une belle maison neuve avec un magnifique sapin. Yukiko a, elle aussi, une très grande maison neuve et ses parents ont reçu beaucoup d'argent de la part de l'homme en rouge. La jeune chinoise, les larmes aux yeux se rend compte qu'à côté de son lit se trouve sa petite sœur. Quant à Louisa, elle a retrouvé son auberge et son lama mais elle est accueillie par un homme et une femme très gentils qui lui font mille bisous à son retour. Tina, la petite fille de la rue trouve à l'emplacement de ses cartons une très grande maison où l'attendent un papa et une maman adoptifs ainsi qu'un frère et une sœur. Finalement, Kubilaï retrouve sa maman, son papa qui est devenu très gentil et retrouve surtout l'usage de sa parole. Il est presque six heures du matin. Les enfants s'endorment, en pensant à leurs amis du monde entier. Yrjö, Samuel, Sabrina, Tina, Julio, Lara, Kate, Inouk, Louisa, Cody, Yukiko, Tini, Kubilaï, Neville, Zora, Mamadou et Nikos font de beaux rêves enchantés, les yeux fermés mais plein de vie, le sourire aux lèvres et la tête pleine d'étoiles. Ils s'endorment heureux, serrant contre eux le jouet que le Père Noël leur a fabriqué et offert avec tant d'amour.

bbchaton

Madame SMITH est un peu triste. Cette année, elle sera seule pour Noël. Sa fille et ses petits enfants habitent trop loin d'ici.

Tant pis ! Madame SMITH va tout de même se préparer un bon petit repas !

Mais le bois est mouillé, le feu ne s'allume pas. Pour se consoler, Madame SMITH se sert un bol de lait. Le chat se précipite, il renverse le bol. Madame SMITH trébuche, elle tombe, et se tord le petit doigt.

Décidément, rien ne va !


Madame SMITH est malheureuse.

Assis dans son fauteuil, elle ferme les yeux et revoit sa fille, avec ses boucles blondes qui, toute petite, lui caressait l'oreille en lui disant tout bas : "je t'aime maman !"

Comme elle était heureuse dans ces moments là !

Madame SMITH s'endort en rêvant d'elle, si bien qu'elle n'entend pas les drôles de bruits qui résonnent brusquement chez elle.

Ca trotte, ça frotte, ça glisse, ça grince, ça chuchote...


Tout à coup, Madame SMITH ouvre les yeux.

Une bonne odeur lui chatouille le nez et elle est tout émerveillée.

Autour d'elle, c'est un vrai conte de fée : le feu crépite dans la cheminée, son manteau est reprisé, le sapin est décoré et...

Madame SMITH n'a pas le temps de comprendre ce qui s'est passé, qu'elle aperçoit alors par la fenêtre, ses tendres et chers petits enfants :

"C'est nous ! On est tous là ! Tu sais, on t'aime, Grand-Mère !"


FIN ;D
   

bunni


Petit sapin deviendra roi

Autrefois, à Noël, les enfants laissaient leurs souliers n'importe où : sous leur lit, près de la porte, au pied de la cheminée ...

Le père-Noël ne savait jamais où déposer ses cadeaux. Il tâtonnait dans le noir à la recherche des souliers et se cognait aux meubles.

Un jour, il décida que tout le monde aurait désormais un arbre de Noël et poserait ses souliers dessous. Et il organisa un concours pour désigner celui qui aurait l'honneur de devenir "l'arbre de Noël"

Dès le printemps, le père Noël se mit en route pour passer en revue les candidats. Tous voulaient se présenter sous leur meilleur jour.

En Europe, les chênes, les bouleaux, les platanes se couvrirent de feuilles tendres et vertes :

"regardez père-Noël, comme nous sommes beaux et majestueux !

-Mouais .... sauf qu'à noël, vous aurez perdu toutes vos feuilles et vous aurez l'air de vieux squelettes !"

En Afrique, le père Noël tomba sur le baobab : "c'est moi ton arbre, papa noël, car je suis le plus gros du monde !

-c'est bien cela le problème : comment veux -tu entrer dans les maisons ?"

En Amérique, le père Noël rencontra le séquoia : " trop grand !"

Au Japon, le bonsaï : "trop petit !"

Dans les iles, le palmier : "difficile à décorer !"

L'hiver venu, le père Noël finit par rentrer chez lui bredouille.

Fatigué par son voyage, il rata l'atterrissage de son traîneau qui fit des cahots dans la neige.

"Aïe ! Ouille ! Attention, il y a quelqu'un dessous ! résonna une petite voix étouffée.

-qui a parlé ? s'étonna le père Noël.

-moi le sapin ! "lui répondit un minuscule arbre couvert de neige.
Le père-Noël se rapprocha : "Oh , petit sapin, tu es si discret que je t'avais oublié. Pourquoi n'as-tu-pas participé au concours de l'arbre de noël ?

-je suis trop petit, trop piquant et trop banal pour avoir cet honneur ! "soupira le sapin en frémissant de toutes ses aiguilles.

La neige qui le recouvrait s'éparpilla alors sur le sol. Et dans son manteau vert, des cristaux de givre se mirent à briller comme une guirlande d'étoiles.

Emerveillé, le père Noël se pencha sur le sapin et huma sa douce odeur de résine.

"j'ai fait le tour du monde, mais ce que je cherchais était caché devant ma porte ! dit-il en éclatant de son bon gros rire.
Désormais, je te le promets, à Noël ce sera toi le roi des forêts et de toutes les maisons !"

bunni


Histoire d'une rose

Il y avait une fois un jardin magnifique. Des centaines de roses y fleurissaient. Leur parfum était suave et leur éclat tel que celui qui les voyait gardait pour toujours le reflet de leur beauté dans ses yeux.  

    Un jour de pluie, quand les nuages semblaient tous s'abattre sur la terre, un pauvre petit scarabée noir errait sur un sentier de ce jardin, en quête de quelque abri.

    En face de lui grandissait un rosier couvert de superbes roses rouges; leurs pétales semblaient de velours, et les gouttes de pluie y scintillaient comme des diamants.

    Le petit scarabée se dit :

    "C'est là que je vais me cacher"

    Mais le rosier était haut,  et le scarabée ne savait   presque pas voler . Aussi était-il un peu ridicule quand, péniblement, il s'éleva en l'air. Enfin il se trouva installé et, très content, se mit à l'aise sous les pétales d'une merveilleuse rose.

    - Oh ! s'écria celle-ci, en frissonnant de dégoût à la vue du scarabée. Ne t'assieds pas sur moi, vilaine bête, tu pourrais salir ma belle robe!

    Le scarabée effrayé s'envola.

    Tout près s'élevait un autre rosier très fier et important. Ses fleurs étaient rose-saumon et leur parfum enivrant. Le scarabée se posa sous la plus grande feuille de la plus belle rose, en se faisant aussi petit que possible pour passer inaperçu. Mais hélas ! bientôt la rose le vit.

    - Pouah ! dit-elle, a-t-on jamais vu pareille horreur ? Quelle vilaine robe noire! Va-t-en , je ne peux supporter de voir des choses laides et je ne te permettrai pas de t'asseoir sous mes belles feuilles.

    Le petit scarabée , triste et fatigué, se remit en route.

    De l'autre côté du sentier, il y avait un rosier fort élégant, portant des roses jaunes aux tiges longues et élancées. C'est là que le scarabée se réfugia, aspirant au repos. Mais tout à coup les roses alentour éclatèrent de rire.

    - Regardez-le, non, mais regardez-le, disaient-elles, comme il a l'air stupide et morose ! quelle honte d'avoir un animal aussi dégoûtant dans notre jardin !

    Et elles continuèrent à dire toutes sortes de choses déplaisantes à l'égard du petit scarabée. Le coeur gros, il se laissa choir sans énergie sur la terre;

    Quand il regarda autour de lui, il se trouva assis sous un tout petit rosier, qui ne portait qu'une seule petite fleur minuscule et presque pas de feuillage. Le scarabée ne bougeait pas, s'attendant à être renvoyé par de cruelles paroles. Rien de pareil cependant n'arriva. Mais tout à coup il entendit des sanglots déchirants. Levant la tête, il vit la petite rose en larmes.

    - Pourquoi pleures-tu, petite rose ? demanda-t-il.

    Celle-ci ne s'était pas aperçue de son arrivée, et elle le regarda, très étonnée et un peu effrayée aussi.

    Les autres roses autour de moi sont splendides et magnifiques, et elles se moquent de moi et me taquinent. Cependant, ce n'est pas de ma faute si je ne suis pas aussi belle qu'elles.

    - Hum ! murmura le scarabée, et il ne dit plus rien.

    - Mais, tu es tout trempé, mon pauvre, s'écria tout à coup la petite rose en remarquant à travers ses larmes l'air piteux du scarabée. Tu vas prendre froid ainsi. Viens plus près de moi pour que je te couvre de mes feuilles !

    Ainsi le scarabée trouva un abri, protégé par la toute petite rose.

    - Ecoute, proféra-t-il après quelques temps, tu es une gentille rose et tu as été bonne pour moi, alors que tes belles compagnes m'ont chassé avec mépris. Voilà pourquoi, désormais, tu seras plus grande qu'elles et même plus jolie.

    La petite rose, incrédule, regardait le scarabée qui disait des choses qui jamais ne seraient.

    - Je suis la fée de ce jardin, continua-t-il. Personne ne connaît mon véritable visage, et personne jamais ne le verra. Mais, ce soir, je viendrai te toucher avec ma baguette magique, et tu ne pleureras plus.

    La nuit, quand toutes les roses étaient profondément endormies, la fée arriva dans son carrosse de toile d'araignée attelé de douze phalènes (ce sont des espèces de papillons de nuit) scintillantes. Sur ses beaux cheveux dorés brillait un diadème de gouttes de rosée, et sa robe était de la couleur des rayons de la lune.

    Elle s'avança vers la petite rose, l'embrassa, la toucha doucement de sa baguette, et puis elle disparut avec son équipage de rêve.

    Le lendemain, quand le jardin se réveilla, la petite rose se trouva être aussi haute que le mur gris contre lequel elle croissait. Des centaines de petites fleurs pareilles à elle-même étaient suspendues à ses branches garnies de jolies feuilles vertes. Et toutes elles bavardaient et riaient gaiement.

    La petite rose était si radieuse de tant de bonheur qu'elle en rougissait. Cela lui donna la couleur la plus ravissante qu'on puisse imaginer.

    Toutes les fières roses alentour regardaient en l'air avec de grands yeux étonnés et jaloux.

    Et voilà l'histoire de la rose grimpante.

bunni


Les treize lutins de Noël

Ce soir, Tom ne pouvait dormir alors Maman est venue lui lire une histoire.
Elle a ouvert le grand livre de Noël celui des contes et des légendes, qu'il aimait tant et, une fois encore, la recette fit miracle.
Le pouce à la bouche, blotti tout contre sa mère, l'enfant se laissa bercer par la voix maternelle.
Il glissa peu à peu dans le merveilleux pays du sommeil, sans même s'en apercevoir. Maman posa alors le livre sur la table de chevet, éteignit la lumière et, après avoir déposé un dernier baiser sur le front de Tom, referma doucement la porte de la chambre derrière elle. Un grand silence prit dès lors possession de la chambre; C'est à peine si l'on entendait la respiration légère de Tom. Mais ce fut de courte durée car c'est ce moment-là que choisit le grand livre pour s'animer ! Il s'ouvrit, déplia lentement ses pages une à une, puis s'étira avec nonchalance.
Aussitôt, treize petits lutins malicieux et un chat s'en échappèrent, en se faisant la courte échelle et en s'esclaffant joyeusement ! Puis, à la queue leu leu, ils entreprirent l'ascension du lit et s'assirent en tailleur, près de l'oreiller, - le chat, lui, préféra le confort moelleux du fauteuil voisin - et tous observèrent le petit Tom, pendant quelques instants. Mais, comme ce dernier dormait toujours ... Alors, ils soufflèrent en cœur sur son nez.

Réveille-toi: C'est bientôt Noël! Tom ouvrit les yeux et les contempla avec étonnement. C'est ce souffle tiède et aussi léger qu'une plume qui l'éveilla.

Celui qui semblait le plus bavard, prit encore une fois la parole :
- Tu ne nous reconnais pas ?...
Nous sommes les lutins de ton livre !
Nous habitons en Islande et nous distribuons des cadeaux aux enfants sages.
Les chenapans n'ont droit qu'à une pomme de terre dans leurs chaussures.
Le chat s'approcha à son tour et demanda d'un ton railleur :
- Auras-tu un vêtement neuf pour cette fête?
Moi, j'emporte et croque ceux qui ont oublié de changer d'habits, ce jour-là...
C'est la coutume ! Noël! Les lutins, l'écartèrent aussitôt avec colère et le matou vexé n'insista pas et il alla se coucher au pied du lit.
Tom, nous avons fait ce long voyage depuis chez nous pour t'aider à préparer Noël car tu es le plus adorable des petits garçons..."
Mais l'enfant n'eut pas le temps de répondre car, l'instant suivant, une pluie d'étoiles délicates et multicolores descendit du plafond et recouvrit le lit, le sol et les jouets de la chambre.
La pièce fut illuminée alors par ces minuscules gouttelettes irisées et changeantes. A la vue de cette merveille, Tom battit des mains de bonheur. Puis, mystérieusement, tout disparut : les lutins le chat et l'étrange averse... Le petit dormait de nouveau paisiblement, sous la couette, dans le silence de la nuit.

Au matin, Maman le réveilla avec une joyeuse impatience: "Tom, viens vite voir! "
Et, joignant le geste à la parole, elle ouvrit la fenêtre et elle poussa les persiennes... L'enfant vit alors un jardin magnifique. Durant toute la nuit, la neige était tombée et, à présent, recouvrait toits et arbres. Elle tapissait le moindre recoin du village d'une lumineuse blancheur immaculée...

Tu vois, Tom, autant de beauté, c'est cela la magie de Noël, ajouta Maman, ravie.


bunni

#550

La louve, le fennec et la girafe

Un conte venu d'Ailleurs...

Dans le Grand Nord, une jeune louve blanche trouvait le temps bien long. La jeunesse a de ces effets : l'adolescence paraît ne jamais devoir finir. La monotonie du paysage la navrait : du blanc partout. L'air était toujours frisquet : la température manquait de chaleur, elle n'atteignait jamais zéro degré, ce qui convient bien aux plantigrades, mais pas aux loups, fussent-ils blancs. Elle vivait seule car elle s'était lassée de ses compagnons qui ressemblaient par trop à la neige quand ils fermaient les yeux et enfonçaient leur nez noir entre leurs pattes. Elle en avait eu assez de suivre la longue file familiale qu'ils formaient avec ses père et mère, oncles et tantes, cousins cousines, visibles l'un au suivant que par la petite tache noire sous la queue, à peine distinguée quand soufflait le blizzard et que les aiguilles de glace piquaient les yeux. Dans le Grand Nord tout est blanc : les bébés phoques, les oiseaux, les renards, les lièvres. Et même les icebergs qui partaient vers l'aventure, mettant le cap vers la pleine mer. En plongeant dans l'eau glacée, ils faisaient un gros bruit. Comme les phoques, ils trouvaient l'eau trop froide et soufflaient de surprise en remontant à la surface respirer.

Où allez-vous grands blocs de glace ? Je vais vers le sud, disait l'un. Voir du pays, répondait l'autre. Au bout du monde, clamaient les plus insolents. La louve les regardait s'éloigner cahin caha comme des pingouins. Maladroits, ils s'entrechoquaient, pressés qu'ils étaient d'atteindre l'horizon. Les courants et les vents les prenaient dès qu'ils avaient atteint le large et leur masse blanche se reflétait longtemps dans le ciel bleu. Elle voulait les suivre, mais trop souvent ils servaient d'île à des ours blancs qui ne sont pas trop regardant sur la viande et l'auraient dévorée sans remords et même avec un plaisir pervers.

Un jour, elle vit un esquif glisser sur l'eau. Elle regarda l'Inuit qui le conduisait et se dit que cet engin serait bien pratique pour son projet. Un projet qu'elle n'avait pas une seconde avant et qui se forma tout armé dans ses moindres détails dans sa tête lupine. Elle suivit en se cachant de l'homme des glaces (c'était simple : elle cachait son bout du nez dans la neige et fermait les yeux et le blanc la recouvrait de son manteau de neige). Quand il fut fatigué, l'Inuit rangea son kayak sur la glace, se fit un igloo et y rangea son petit barda puis s'enferma pour se reposer quelques heures dans la courte nuit laiteuse. La louve alors vola la pagaie et le kayak et s'enfonça vers le sud.

Elle rejoignit rapidement les icebergs et les accompagna durant des milles et des milles, nautiques naturellement, ce qui rallonge fort la distance de devoir en suivre les creux et les bosses. L'océan roulait ses longues lames surmontée d'une crête mousseuse. La louve se nourrissait de poissons imprudents qui venaient voir ce curieux Inuit ; elle les cueillait d'un preste coup de pelle de pagaie, les lançait en l'air et les gobait, ne les croquant que s'ils méritaient cet honneur par leur taille. Pour se désaltérer, elle suçait un morceau de ses accompagnateurs quand cela était nécessaire.

Les glaces fondaient, la température montait, un jour, elle fut seule avec sa soif au milieu de l'océan. Le kayak souffrit de la chaleur : il la prévint dans la langue kayak qu'elle comprenait à force d'avoir fréquenté l'esquif. De craquements des arceaux de bois et d'os en chuintements de peaux cousues et de fils de nerfs, la louve entendit que le kayak prenait l'eau et allait mourir. Il était heureux du voyage, mais le sien s'achevait. Etait-ce la fin du mien aussi ? se demanda la louve inquiète. C'est alors qu'elle vit une masse sombre entre les ondulations de la houle. Elle s'approcha mi ramant, mi nageant.

C'était un grand tronc d'arbre qui roulait sa masse à des milliers de milles marins des tropiques. La louve lui demanda ce qu'il faisait là. " Je suis un vaillant okoumé des forêts d'Afrique ", lui répondit l'arbre. Cet imbécile de Gulf Stream me balade de par le monde, il attend que les vers me bouffent, que les moules me noient de leur poids mort ! Il pleurait en parlant. La louve lui dit alors : " Je vais t'aider à te diriger, allons chez toi ". (Elle se disait qu'ensuite elle irait au bout du monde par d'autres chemins.) Elle dit adieu au kayak démantibulé qui sombra, heureux du voyage, heureux de devenir sous-marin.

Ils naviguèrent longtemps. La louve dirigeait le tronc en profitant des courants. Elle assommait les tortues marines trop curieuses, cueillait les poissons volants trop imprudents et croquait les oiseaux paresseux qui avaient confondu la robe de la louve avec de l'écume. Les pluies avaient empli d'eau pure les anfractuosités de l'arbre, et elles ne manquèrent jamais car c'était la saison des grands orages.

Et ce fut un jour une longue ligne brunâtre à l'horizon. La louve dirigea le tronc courant d'un bord à l'autre pour l'orienter. L'okoumé ne se tenait plus d'impatience : " Ça sent la terre d'Afrique ! ", criait-il en roulant sa masse dans l'eau salée, et la louve devait sauter pour ne pas se tremper. Effectivement, c'était l'Afrique, mais pas celle des pluies et des éternelles forêts mais celle des ciels toujours bleus et du désert non moins éternel. C'est ainsi qu'ils abordèrent une plage de sable roux sur laquelle la louve sauta alors que l'okoumé y enfouissait sa masse, trop heureux d'être là et content de mourir chez lui, même s'il était né un peu plus au sud. Leurs adieux furent brefs car le tronc s'endormit aussitôt et la louve s'avança dans le Sahara.

Elle marchait depuis quelque temps quand elle entendit un petit rire. Elle avait beau tourner la tête tout autour, elle ne voyait rien, elle était étonnée de ne rien voir, elle qui était habituée à voir sans être vue. Finalement, elle vit la lumière sur le sable bouger : une petite chose, comme un tout petit renard, dressa la tête. Il était couleur de dune, seuls ses yeux et son nez faisaient trois petites taches noires sur le sable, il avait de grandes oreilles. " Qui es-tu ? " lui demanda-t-il. " Je suis une louve du Grand Nord ", répondit-elle. " Pourquoi es-tu toute blanche ? " " Pour me confondre avec la neige ". La réponse était si absurde qu'elle-même éclata de rire. " Et toi ? " " Moi, je suis un fennec. Touareg de haute lignée, renard du désert et clerc du Livre. J'ai la robe rousse pour me confondre avec le sable. Je pense que si j'allais chez toi, c'est toi qui me verrais et moi qui te rechercherais ". La justesse du raisonnement étonna la louve qui se prit d'amitié pour ce petit bout d'animal dont elle n'aurait fait qu'une bouchée si elle l'avait trouvée gambadant dans ses neiges éternelles.

"Je suis sûr que tu as soif, dit le fennec, viens je vais t'amener à une source ". Et ils marchèrent ainsi quelques heures, ce qui au regard de l'éternité est bien peu, chose dont dû convenir la louve à son nouvel ami dont la sagesse semblait être inépuisable, et dont le verbe était fort disposé à la partager. Le soir venu, dans la nuit froide, il l'invita chez elle où ils déjeunèrent frugalement d'un petit tas de sauterelles, d'un lézard et d'un serpent dont la louve ne voulut pas. C'est ton fétiche ?!, constata plus qu'il n'interrogea, le fennec. " Moi, dit-il pour répondre à l'interrogation qu'il lut dans ses yeux, je n'ai pas de totem, je mange de tout ". Toute la nuit ils parlèrent. La louve parla de son rêve d'aller au bout du monde, le fennec lui, n'avait pas de rêve de ce genre, mais aller explorer le monde, pour un philosophe tel que lui, ne manquait pas de charme. Plurielle est l'humanité, multiple est l'univers, ils en convinrent, demain, ils partiraient vers le sud.

Dès qu'ils furent réveillés, ils prirent la route et atteignirent le grand fleuve Sénégal en quelques jours. Le gibier abondait, la louve se nourrissait facilement : gazelles et lièvres la regardaient étonnés, quand aux troupeaux des hommes, peu habitués aux incivilités des loups, ils ne se méfiaient nullement. Il lui était facile de s'en saisir. Le fennec accompagnait son amie à la table et en dessert dévorait puces et tiques dont le goût d'insecte le ravissait.

Ils atteignirent ainsi les immenses savanes herbeuses, avec leurs grands arbres : baobabs ventrus, caïlcédrats aux contreforts de cathédrales, rôniers élancés. Et dans les bas-fonds humides, l'enchevêtrement végétal des lianes, palmiers, nim... C'est là qu'ils rencontrèrent une girafe. Elle broutait les pattes écartées quand le fennec la salua. Une grande arrachée d'herbe dans les dents, elle regardait la petite chose insolente qui la toisait. C'était un animal bien petit pour un chacal ! Par ses grandes oreilles, ce n'était pas non plus un écureuil des sables ! Et d'une queue plus touffue qu'un lièvre, dont elle avait l'insolence du regard... Devant l'interrogation muette, la petite chose lui dit : " Je suis un fennec. Bien le bonjour madame la girafe ". " Monsieur, corrigea-t-elle, Monsieur la girafe, monsieur le minuscule à quatre pattes ". " Monsieur la girafe ", reprit le petit à quatre pattes qui ne se vexa pas pour autant. (Décidément, le fennec devait être apparenté au lièvre, se dit la girafe : il ne se démonte pas facilement, en a l'intelligence ; en aurait-il l'astuce ? Elle décida de se méfier.) Le petit être roux siffla et la louve les rejoignit. La girafe méfiante se redressa, prenant son assise pour envoyer une ruade de ses sabots sur la nouvelle venue habillée tout de blanc comme un colonial, mais sans casque colonial... ce n'était pas un colonial. Blanche comme une Addjia revenue de La Mecque, enturbannée et vêtue de voiles immaculés ! se dit la girafe. La louve vint et quand la confiance fut établie, elle raconta son désir d'aller à l'autre bout du monde.

L'autre bout du monde ? Mais c'est la ville ! Car, dit la petite voix mâle perchée sur son long cou, quoi de plus opposé à la brousse que la ville ? Allons à Dakar ! D'autorité, ils prirent tous trois un taxi-brousse qu'ils payèrent en monnaie de singe qu'un babouin leur avait donnée contre des intérêts exorbitants qu'ils acceptèrent et oublièrent tout aussitôt. Après de multiples pannes, crevaisons, dérapages incontrôlés qui faisaient perdre des bagages et obligeaient à revenir sur ses pas pour les recueillir, les trois amis arrivèrent enfin à Dakar.

Quel monde ! Quelle cohue ! Des haut-parleurs braillaient des réclames pour des pagnes de toute qualité, des klaxons résonnaient par toute la ville. Nos trois amis apeurés se tenaient par la main, tentant de traverser aux feux, pour eux toujours rouges puisqu'ils n'étaient que de faibles piétons. Un petit saï-saï de rat de ville les vit et comprit tout le profit qu'il pourrait faire à cornaquer ces trois broussards mal dégrossis dans la grande ville, la capitale de l'Afrique Occidentale, et donc du monde.

Il les promenait dans les hauts lieux de la ville : Sandaga, avec son crépitement ininterrompu des machines à coudre et à broder, le marché Kermel ruisselant de victuailles, le Teranga et son grand hôtel, la Place de l'Indépendance enchâssée dans ses grands immeubles (celui des allumettes les impressionna particulièrement), la plage de Soumbédioune et ses longues et fines pirogues multicolores. Il voulut les emmener voir l'île de Gorée, ce qui effraya bien la girafe qui sentait le bateau bouger dangereusement mais laissa le fennec de marbre car il tenait serré contre lui les Saintes Paroles écrites sur un éclat de peau dans un petit étui de cuir protecteur. Quant à la louve, elle n'avait pas peur, elle connaissait la mer d'ici au pôle nord. Le rat, lui, attendait l'occasion de les dépouiller de leurs sous. C'est lui qui payait tout pour les mettre en confiance et, quand il voulut se faire payer le repas avant de les détrousser, il s'aperçut que ses hôtes n'avaient pas d'argent. Pas même des travellers check en bois ? Non, rien. Rien que des paroles. Il voulut s'éclipser mais la girafe passant sa tête au-dessus du mur de la rue le récupéra par le pantalon et le livra au restaurateur pendant que le fennec expliquait aux clients l'énorme arnaque dont ils étaient la victime. La venue de la police rendit sa liberté au trio qui, fatigué de tout, du bruit, de la poussière, de la ville et de ses lourdes odeurs alla dormir au Point E, sur la plage, bercé par le ressac des vagues alors que le centre IFAN restait illuminé et que la côte se dessinait par les multiples réverbères qui longeaient la rive à la queue leu leu, tournant le dos à la mer et regardant la route que seuls empruntaient quelques taxis en maraude qui roulaient à tombeau ouvert.

Non, pensait la louve dans la nuit chaude, alors que le fennec s'était blotti au plus chaud de la girafe en recherchant sa tiédeur, non, ce n'était pas ici le bout du monde. Même si c'était le contraire de son monde à elle : chaleur, bruit, odeurs..., ce n'était pas le bout du monde.

Au matin, elle s'en ouvrit au fennec qui en parla à la girafe qui en décida derechef de rentrer dans son Sénégal Oriental, avec ses buissons épineux bien savoureux, ses herbes sèches comme des coups de trique, son sable qui craquait bien sous la dent... Elle, la girafe mâle, avait été à son avis au bout du monde et maintenant qu'elle avait bien vérifié qu'il n'y avait rien à y voir, elle pouvait rentrer chez elle. Elle voyait que pour ses deux compagnons penchés sur une mappemonde le voyage était à peine commencé, alors, dans le jour naissant, elle fit ses adieux et de son amble infatigable prit la route de l'est, vers Thiès, Tambacounda et tous les villages qu'égrènent les hommes le long des routes. Elle se fit très discrète et rentra sans encombre à la maison.

L'année se terminait, une aube nouvelle s'annonçait. La louve et le fennec prirent la route à leur tour. Mais ils ne dirent à personne où ils avaient décidé d'aller. Un jour, l'odeur des neiges manquerait à la première, et le second se languirait de celle des ergs brûlés... mais pour se nourrir, de telles nostalgies demandent du temps et de l'espace, où s'épuisent les rêves.

bunni


Le petit monde de l'Arc-en-Ciel

Le ciel voilé, cerné de gros nuages grisonnants, laissait deviner l'approche d'un orage.

Dans la vallée paisible, le souffle léger du vent, faisait frémir les feuillages des arbres et courber les herbes folles les plus rebelles...

Popeline qui sentit l'arrivée imminente de la pluie, partit en courant s'abriter dans une vieille bergerie, abandonnée au milieu des grands prés.

Déjà l'odeur humide s'évaporant de la terre venait lui chatouiller les narines, la petite fille de chiffon huma les odeurs douces et suaves qui l'envahissaient...

Les gouttes de pluie tombèrent enfin ! Popeline ne risquait rien.

Dans la tiédeur de son abri de fortune, la poupée de chiffon regardait effrayée et admirative, le ciel se déchirer par la violence des éclairs qui zigzaguaient et illuminaient la vallée, désormais en pleurs !

Pensive, elle la vit à peine...

Une petite fille, marchait là sous la pluie devenue rageuse, elle n'était pas terrorisée par le vacarme du tonnerre, ni par le ballet intempestif des éclairs !

Popeline voyant le danger, appela de toutes ses forces l'enfant ruisselante de pluie, la petite fille de chiffon faisait de grands gestes, lui disant de venir au plus vite s'abriter et se protéger de l'orage qui devenait de plus en plus menaçant.

L'enfant arriva enfin dans l'asile improvisé, dégoulinante de pluie, le visage ruisselant de larmes, il y avait tellement de désespoir dans le regard de la petite fille que Popeline sentit sa gorge se serrer... Qu'est-ce qui peut rendre si triste et si inconsciente du danger une si jeune enfant ?

Gracieuse et toute menue, la fillette devait avoir à peine cinq ou six ans.

Ses fins cheveux blonds comme les blés, collaient sur son front haut, les larmes avaient pâli ses yeux d'un vert aussi profond que l'éclat d'une émeraude.

Cette enfant était d'une exquise joliesse, pourtant un savant mélange de désarroi et d'espoir semblait l'envahir.... Popeline au coeur tendre, en fût très émue.

Ensemble, en silence, les fillettes attendirent que l'orage s'éloigne et que la menace s'écarte définitivement.

L'accalmie ne se fit point attendre, déjà la pluie avait cessé et le soleil commençait à pointer délicieusement ses premiers rayons doux et tièdes.

Popeline se décida enfin, à demander à la fillette ce qui la rendait si triste...

Elle s'appelait Elwing, pluie d'étoiles en langage Elfique, sa maman adorait les fées, les elfes et lui contait de merveilleuses histoires, d'un pays imaginaire, nommé Féerie.

Elwing avait six ans et venait de perdre son compagnon de jeux, un adorable petit chat noir, bien imprudent qui n'avait pas vu la voiture arriver !

La détresse de la petite fille était sans fin...

Sa mère, lui avait dit que l'Arc-en-Ciel qui se dessine dans le ciel, les jours ou le soleil joue avec la pluie, était un pont entre la Terre des humains et les êtres chers qui nous avaient quittés...

C'était la raison pour laquelle Elwing, errait les jours de pluie, le coeur emplit d'espoir d'apercevoir un Arc-en-Ciel qui lui permettrait de retrouver, même l'espace d'un instant, son petit ami.

Popeline, attendrit par cette jolie croyance, prit Elwing par la main et toutes deux s'éloignèrent de la bergerie...

La fillette aux grands yeux émeraude parlait timidement avec la poupée de chiffon, elle ramassait des grosses marguerites, encore gorgées de gouttelettes en récitant à voix basse :

-Je t'aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie... mon éternel ami !

Soudain, dans l'horizon limpide se dessina un superbe Arc-en-Ciel !

La surprise des fillettes fût grande, lorsqu'elles virent, haut, bien loin dans le ciel, tout un petit monde qui s'animait et s'agitait.

Elwing, les yeux rivés vers l'infini, aperçu le chaton, il était là lui aussi.

Tendrement, la petite fille, le regard embué de larmes lui envoya un doux baiser.

Mais déjà les couleurs lumineuses de cet Arc de Lumière se firent plus pâles, jusqu'à disparaître, laissant place à un ciel sans nuage.

Les fillettes se regardèrent troublées par cet événement inattendu, le coeur envahit d'un baume d'une délicieuse douceur.

Alors, c'était vrai ! Nous ne perdons jamais ceux que l'ont a aimé, ils sont toujours là, près de nous...

Et si c'était dans la beauté d'un Arc-en-Ciel !

bunni


La Femme-Fleur

     Toutes les femmes sont des fleurs et personne n'osera me contredire –surtout pas les femmes – mais il y a des femmes qui sont plus fleurs que d'autres : ce sont les Femmes-Fleurs.

           Les Femmes-Fleurs : elles ont deux vies. Rose au soleil et Femme à la lune. Une de ces Femmes-Fleurs avait séduit un homme, à se faire aimer de lui et même à se faire épouser. L'homme savait bien que son épouse était une Femme-Fleur, mais elle était si belle, si différente qu'il n'avait pas pu lui résister. Alors tout le jour, il l'attendait et lorsque le soleil se couchait, il l'espérait. Et quand le soir venu, elle venait à lui, l'air était comme empli de promesses. Un soir, il l'attendait comme à son habitude, elle est venue à lui, le rose aux joues, plus vive que jamais.

« Mon mari, une grande nouvelle ! si tu me cueilles demain matin, avant-midi, toi mon unique, je serrai avec toi pour toujours. Par contre, si tu te trompes et que tu cueilles une autre fleur, tu ne verras plus jamais ! »

           L'homme accepta le défi. Et le lendemain matin, il est allé dans le jardin. Il y avait des dizaines et des dizaines de fleurs. De toutes les couleurs, de toutes les formes, de tous les parfums. Il a tranquillement fait le tour de son jardin, a examiné chaque fleur puis il s'est approché d'une fleur, elle était blanche. Il a saisi sa tige entre ses doigts et il l'a cueillie. Et la fleur est devenue Femme, sa femme.  

L'histoire ne nous dit pas s'ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants...

Mais l'histoire ne nous dit pas non plus comment l'homme a-t-il pu retrouver son épouse parmi  des centaines et des centaines de fleurs ?


*Si la Femme-Fleur passait la nuit dans sa maison, dans les bras de son mari, elle ne pouvait, le matin venu, être couverte de rosée. Voilà comment l'homme a découvert la bonne fleur parmis toutes les autres.

bunni


L'amitié d'un petit nuage

Autrefois, un village situé sur un endroit surélevé abritait une petite tribu de pêcheurs. Il était relié par un talus au reste de la vallée dans laquelle le clapotis d'un ruisseau résonnait en un bruit sourd !

L'eau de ce ruisseau coulait vers le grand fleuve qui serpentait dans cette vaste contrée équatoriale. Des algues aquatiques, parsemées en îlots sur le fleuve formaient un tapis vert... quelques oiseaux frôlaient l'eau dans leur survol.

Une fillette, du nom de Djenita, s'engageait sur la descente vers le ruisseau, une bassine de vaisselle à laver sur la tête. Elle avait le cœur gros ! Sa mère ne lui avait pas permis de prendre le manioc aux arachides qu'elle avait demandé. Sur ce, Anita, son aînée de deux ans, se moqua d'elle en grimaçant. Cela déplut à Djenita. Elles se disputèrent, la mère les sépara et les réprimanda. Anita, plus espiègle, s'expliqua de manière à faire retomber toute la faute sur sa petite sœur, qui se fit gronder. Et, comme si cela ne suffisait pas, la mère lui ordonna d'aller faire la vaisselle au ruisseau ; pourtant, elle aurait préféré jouer avec ses amies.

En s'y rendant, la petite décida d'aller voir sa grand-mère, pour lui rapporter tous ses malheurs ! Mais, au lieu de condamner les autres comme elle souhaitait l'entendre, cette dernière se lança dans un long discours de moralisation que Djenita trouva ennuyeux. «Décidément, personne ne me comprend !» se disait-elle poursuivant son chemin.

Assise au bord de l'eau, ces petits faits trottinaient dans sa cervelle ; d'un air absent, elle jetait des cailloux dans l'eau.

C'était l'équinoxe de mars ; les pluies étaient plus qu'abondantes en cette époque de l'année. La nature était luxuriante, riche en verdure. L'eau du ruisseau épousait la couleur verte des hautes herbes d'alentour.

Après le grand orage de la nuit, une radieuse matinée s'était levée ; la rosée avait la couleur de l'arc-en-ciel.

Au loin, une magnifique forêt équatoriale se dressait. Quelques singes sautillaient d'une branche à l'autre. L'un d'eux se plaça au sommet d'un arbre comme pour prendre un bain de soleil. Des gouttes d'eau dégoulinaient à chacun de ses mouvements. Dans le ciel, quelques nuages blancs flânaient... un oiseau battait des ailes, puis vola plus haut...

Djenita observait l'oiseau et le nuage ! «Comme il serait agréable de nouer amitié avec le petit nuage blanc ! Il m'invitera peut-être un jour à lui tenir compagnie dans sa balade aérienne. Là, je serai gaie, à l'abri des taquineries d'Anita, des réprimandes de ma mère et des incompréhensions de grand-mère !» se disait-elle.

Et, si cela arrivait, poursuivit-elle, comment m'y prendrais-je ? Faudrait-il monter sur l'arbre et de là être portée sur les ailes d'un oiseau ?

Ainsi plongée dans ses rêveries, la gamine s'endormit. Dans son sommeil, elle vit ce qui suit :

Elle se trouvait dans un lieu beau. Il y avait une multitude d'oiseaux de toutes tailles. De nombreux lutins glissaient furtivement ça et là, et dans le ciel le petit nuage dont elle souhaitait l'amitié planait...

Étonnée, son regard allait des oiseaux aux lutins. Et, quand elle regarda le nuage, elle se dit : «Peut-être que les ailes puissantes de l'aigle vont me porter...» Elle fit un pas vers lui, mais de nombreux lutins lui barrèrent le passage. Ne comprenant rien, elle s'arrêta.

L'index droit posé sur les lèvres, elle réfléchit rapidement : «Sûrement, j'ai fait un mauvais choix !»

Lorsqu'elle voulut s'avancer vers un autre, les lutins l'empêchèrent de passer.

Et, ce fut ainsi pour toutes les tentatives qu'elle fit. N'y comprenant rien, elle s'assit sur une pierre. Ses yeux se remplirent de larmes : «Ô gentil petit nuage, ne peux-tu pas descendre toi-même me prendre ?» pleurait-elle.

Émus, les lutins l'entourèrent. Ils compatissaient bien à sa peine, mais ne pouvaient rien pour elle. Elle devait trouver la solution de l'énigme toute seule.

Ses larmes coulèrent tellement qu'elles s'accumulèrent et formèrent une petite flaque d'eau sur le sol.

D'en haut, le petit nuage avait suivi toute la scène et avait perçu le souhait de Djenita. Il s'adressa à un rayon solaire : «Aidons-la !» lui dit-il. Ce dernier comprit ce qu'il fallait faire.

Le rayon descendit en chantonnant et se braqua sur la petite flaque d'eau. En un rien de temps, le liquide se transforma en vapeur qui monta allègrement rejoindre le nuage blanc. Djenita suivit la scène avec stupeur. Son regard allait des lutins au mignon rayon de soleil qui avait été à la base de ce miracle.

Qu'est-ce que cela veut dire ? Et les lutins et le rayon de soleil avaient les yeux fixés sur elle, comme s'ils attendaient quelque chose.

Elle comprit qu'elle devait trouver elle-même.

Soudain, elle se dit : «il me semble que je dois devenir aussi légère, aussi transparente que cette vapeur qui s'est élevée tout à l'heure...» Avant même qu'elle ait terminé sa réflexion, les bons amis applaudirent. Elle comprit alors que sa pensée était juste.

Ensuite, elle se dit : «Alors, si je ne suis pas aussi légère et transparente, c'est que je suis lourde et sombre... Pourquoi ?... Ah ! À cause de la rancœur que j'entretiens contre Anita, ma mère et ma grand-mère.»

Son désir de s'élever était tellement grand qu'elle dégagea facilement ce qui l'alourdissait. Elle secoua fortement son buste, et, trois petites boules noires tombèrent une à une de son cœur, roulèrent sur le sol et finirent par tomber dans un trou noir et profond.

Libre, légère, elle s'éleva facilement et de nombreux oiseaux l'escortèrent. Le rayon du soleil la précédait, illuminant son chemin et les lutins pirouettant de joie.

Comme l'accueil du petit nuage fut chaleureux ! Djenita fut surprise et émerveillée de constater que le nuage qu'elle croyait inerte était devenu un être bienveillant ! Il lui fit un accueil de princesse.

Au rythme d'un hymne solennel, tous, oiseaux et sylphes, firent visiter à Djenita les profondeurs du ciel. Que de beauté ! Que de merveilles la nature ne renfermait-elle pas !

Enfin, elle fut raccompagnée sur terre où ses amis l'attendaient avec des sourires satisfaisants. Sur ce, Djenita se réveilla. Regardant autour d'elle, elle émit ce souhait :

«Abandonner la rancune pour rester aussi légère qu'un fin pétale de fleur, aussi transparente qu'un sourire candide, afin de goûter, encore et encore, à cette félicité».

bunni


Le château de sable

La mer allonge devant elle de longues vagues qui lèchent la plage avec une tendresse imperturbable.

-La marée monte, remarque Amidou.

A ces mots, Harida ne réussit plus à retenir ses larmes qui coulent silencieusement le long de son visage. Amidou la serre contre lui comme pour la consoler, mais lui aussi a le cœur gros et s'efforce de ne pas pleurer. Il était si beau leur château de sable, ce château qu'ils avaient construit avec amour pendant tout un après-midi, ce château qui avait abrité leur rire et leurs contes d'enfants. Que de coquillages retournent ainsi à la mer, anonymes! C'était Harida qui les avait presque tous découverts puis en avait décoré la solide construction de son frère. C'est le château le plus magnifique qui ait jamais été construit et voilà que la mer l'efface impitoyablement, à coup de petites vagues.

La dernière tour du château  s'efface. Le petit garçon se recroqueville pour cacher des larmes qu'il ne peut plus contenir lui non plus. La mer continue de monter, mais les enfants ne bougent pas, comme s'ils voulaient rester solidaires de leurs jeux enfouis sous l'eau. La mer se heurte à ces quatre tours de chairs qui semblent ne jamais vouloir bouger, malgré la voix inquiète qui hurle au loin:

-Amidou, Harida. Où êtes-vous ? La marée monte. Revenez !

Mais les deux enfants ne l'entendent pas, cette voix-ci.

Ils ne remarquent pas que la mer va finir par les emprisonner. C'est alors qu'une toute petite voix les tire de leur torpeur. Une petite voix qu'ils ne connaissent pas.

-Ne restez pas là, la mer est féroce.

Amidou et Harida regardent autour d'eux, s'affolent. Comment ont-ils pu oublier les recommandations de leur mère ? L'eau leur arrive presque à la taille. Ils ne parviendront jamais à rejoindre la terre ferme à temps. Ils essayent de courir, mais la mer est plus rapide qu'eux et semble se jouer de leurs efforts. Une fois encore la petite voix susurre tout près d'eux.

-Pas par-là. Nagez vers le rocher qui pointe là-bas au large.

Un rocher ? Ils n'en avaient encore jamais vu sur cette plage. Qu'importe ! C'était peut-être plus facile d'atteindre ce rocher à la nage que de retourner vers le rivage qui s'éloigne, et d'attendre là qu'on vienne les secourir. Les deux enfants se mettent à nager du mieux qu'ils le peuvent. Amidou reste près de sa sœur de peur de la perdre. Le rocher se rapproche. Les voilà sauvés. Ils se hissent sans trop de difficulté au sommet de la roche et ils se mettent à attendre sans trop savoir quoi. Mais bientôt le rocher se met à trembler tandis que la voix, dont ils n'ont toujours pas vu le propriétaire, les rassure.

-Ne bougez pas, il ne vous arrivera rien.

Pourtant, le rocher tremble de plus en plus, et les enfants ont peur, se serrent l'un contre l'autre, craignant à tout instant d'être projetés dans l'eau froide. Tout à coup, une explosion formidable semble secouer l'océan... le rocher est alors happé par les fonds marins. Les deux enfants se mettent à hurler, mais leurs cris ne leur servent à rien, sont avalés par l'abîme qui s'ouvre à leurs pieds... Et la petite voix toute tranquille qui continue à leur affirmer qu'ils n'ont rien à craindre n'atténue que peu leur effroi, cramponnés qu'ils sont à leur rocher.

Leur course folle à travers la mer finit enfin par se terminer. Les voilà au cœur de l'océan. Curieusement l'eau qui les entoure ne les oppresse pas. Ils respirent normalement. Très vite, ils s'habituent à l'obscurité ambiante et aperçoivent autour d'eux de petits poissons lumineux qui les observent avec intérêt. Harida aimerait parler à son frère, mais elle a peur d'avaler de l'eau en parlant. C'est ce moment-là que choisit un poisson étrange, un peu plus grand que les autres, pour s'approcher d'eux. Son corps de couleur bleue est lisse, sans écaille. L'animal nage lentement autour des deux enfants, comme pour les observer, comme s'il était pensif. Harida et Amidou, gênés, aimeraient bien pouvoir se cacher, mais, il n'y a aucune roche, aucune algue aux environs sous lesquelles disparaître. C'est alors que le poisson se met à grandir, grandir... pour atteindre la taille d'un enfant... ou plutôt d'une petite sirène. Car le poisson a un joli visage à présent. Il a un corps et des bras. Harida ne peut s'empêcher d'ouvrir la bouche toute grande d'étonnement, cette bouche qu'elle s'efforçait tantôt de garder fermée de peur qu'elle se remplisse d'eau. Harida se met alors à tousser l'eau de mer qui en a profité pour pénétrer dans sa gorge. La petite sirène éclate d'un rire rempli de bulles et se met à tourbillonner autour d'eux à toute vitesse. Lorsqu'elle s'arrête enfin, elle s'exclame :

-Que faites-vous donc ici ? Vous n'avez ni nageoires, ni tentacules!

Harida est furieuse contre cette sirène insolente qui se moque d'eux. Elle voudrait lui répliquer quelque chose de méchant, mais elle ne sait pas quoi. Quant à Amidou, insensible à l'impertinence de ce poisson-femme, il lui répond gentiment, sans songer au risque qu'il a d'avaler de l'eau :

-C'est un rocher qui nous a amenés ici.

La voix d'Amidou résonne étrangement et, étonnamment, l'eau n'a pas pénétré dans sa bouche quand il a parlé.

La sirène éclate encore de son joli rire rempli de bulles.

-Ah ! Le rocher...

La petite sirène tourne deux fois autour des deux enfants et disparaît sans donner d'explications. Les deux enfants se regardent, frigorifiés, ne sachant que faire. Prisonniers au fond de l'eau, ils se demandent comment se sortir d'une situation aussi étrange. Harida tremble, voudrait se montrer courageuse face à son grand frère, et elle lutte pour ne pas céder à la panique qui l'envahit peu à peu.

-On pourrait essayer de remonter à la surface, suggère Amidou d'une voix déformée par l'eau environnante. Essayons de nager.

A ces mots, Amidou saisit la main de Harida et tous deux tentent de nager vers la surface de l'eau. Ils agitent leurs jambes le plus vite possible, mais le sol ne s'éloigne pas le moins du monde. Ils sont comme attirés par le sable du fond de l'eau.

-J'étais sûre que cela ne marcherait pas, soupire Harida au bord des larmes.

Amidou tente de la rassurer :

-On trouvera bien une solution.

A ce moment, l'eau se met à bouillonner autour d'eux remuant le sable des fonds marins ; lorsque le sable retombe, une dizaine de petites sirènes les entourent, dont celle qui s'était moquée de Harida. Toutes se mettent à rire de toutes les bulles qu'elles sont capables de former, au grand étonnement d'Amidou et de Harida.

-Pourquoi rient-elles comme ça ? demande Harida.

Amidou n'a pas le temps de répondre qu'une voix douce mais néanmoins autoritaire fait taire les jeunes sirènes.

-C'est la même voix qu'avant, chuchote Harida.

Bientôt la voix prend corps. Une toute petite femme dotée de deux jambes et de deux bras - et non d'une queue de poisson - apparaît sous les yeux émerveillés des deux enfants. Elle porte une longue robe d'algues phosphorescentes et ses cheveux roux sont surmontés d'une couronne de coquillages.

-Bonjour Harida, bonjour Amidou. Je vois que vous avez suivi mon conseil. C'est bien. Maintenant, suivez-moi.

Sa voix est celle d'une femme habituée à commander.

-Comment sait-elle nos noms ? ne peut s'empêcher de chuchoter Harida.

-Je n'en sais rien. 

La jeune femme se retourne :

-Vous vous demandez comment je connais vos prénoms ? C'est à cause des châteaux de sable, bien sûr !

Et la belle dame poursuit sa route sans en dire plus, comme si cela allait de soi. Les deux enfants se regardent interloqués : le mystère ne fait que s'épaissir.

Pendant longtemps, ils marchent ainsi au fond des eaux. Pas une seule fois, la jeune femme ne se retourne pour voir si les enfants la suivent toujours. Pas une seule fois, Harida ne se plaint d'être fatiguée, ni son frère non plus. Car ils se sentent léger, leurs corps ne les embarrassent pas, la fatigue semble ne plus avoir prise sur eux. Ils sont tellement absorbés par cette impression de bien-être qu'ils ont à chacun de leurs pas, qu'ils ne s'aperçoivent pas du changement qui s'opère dans leur environnement. Cependant, Amidou trébuche sur un caillou et réalise qu'il foule à présent des rochers couverts de pétales de rose - ou bien sont-ce des algues qui leur ressemblent.

-Tu as vu ?

-Quoi ?

-Il n'y a plus de sable ! chuchote Amidou.

-C'est à cause des châteaux, intervient leur guide sans se retourner et sans donner d'autres explications.

Les deux enfants regardent alors autour d'eux. L'eau qui les entoure est devenue plus claire, presque lumineuse. Les sirènes, désormais silencieuses, les ont accompagnés sans qu'ils s'en rendent compte. Devant eux, apparaît, floue,  une muraille de glace opaque. Elle vacille comme un mirage surgi en plein désert. Mais bientôt, la petite troupe est arrêtée par un portail imposant. La belle dame se retourne vers eux, fait un geste comme pour chasser les petites sirènes qui hésitent d'abord à obéir. Le regard de la dame se fait impérieux. Les sirènes s'en vont dans un tourbillon, déçues.

La porte s'ouvre alors sur un labyrinthe de couloirs de cristal d'or. Amidou et Harida sont éblouis et ont de la peine à s'habituer à la luminosité du lieu. Leur guide accélère le pas, si bien qu'ils craignent à tout instant de la perdre. Pourtant, au moment ils s'y attendent le moins, le couloir débouche sur une immense salle remplie de miroirs. Au fond se trouve un trône solitaire sur lequel est assis un roi tout aussi seul. Lorsqu'elle le voit, Harida se sent presque triste. Un si grand palais pour tant de solitude. Mais bientôt le petit roi sourit, leur fait signe de s'approcher. De près, le souverain semble un peu flou, comme le château. Sa peau est granuleuse et dorée et à chacun de ses mouvements un peu de poussière s'éparpille alentours. Etrange aussi l'intonation de sa voix qui crisse lorsqu'il leur adresse la parole :

-Alors, vous voici enfin. Je vous ai attendus depuis si longtemps.

-Vous nous avez attendus, nous ?

-Vous ou d'autres enfants du monde terrestre. Cela fait des millénaires que je suis là à vous attendre pour vous révéler mon secret. Le secret des châteaux.

Le vieux roi se lève allègrement de son siège en répandant au passage des milliers de petits grains de poussière d'or.

-Suivez-moi !

Dociles, Amidou et Harida, sans plus oser poser de questions, suivent le gentil roi à travers de nouveaux labyrinthes, tandis que leur guide disparaît ailleurs. Leur promenade ne dure guère et bientôt un jardin gigantesque d'algues multicolores surgit. Et au milieu de cette verdure marine, des châteaux, des châteaux de sable de toutes les grandeurs reflétant la fantaisie de nombreuses générations d'enfants. Des châteaux forts et des châteaux dignes de la belle au bois dormant, des châteaux d'ogres et de dragons, des châteaux de nains et de géants, des châteaux de princes et de princesses gais ou tristes. Certains sont décorés de coquillages, d'autres de petits cailloux gris ou colorés, d'autres ne sont pas décorés. Emerveillés, les enfants se promènent au cœur de ce monde de châteaux de sable éphémères. C'est magique ! Jamais ils n'ont vu autant de merveilles. Et devant chacune de ces œuvres, un ou plusieurs noms sont gravés sur un galet. Lorsqu'ils se sont bien promenés, lorsqu'ils ont remplis leurs êtres de tant de beauté, Amidou se tourne vers le souverain avec une question dans le regard :

-D'où viennent tous ces merveilleux châteaux ?

Mais au lieu de répondre, le roi prend Amidou et Harida par la main et les emmène vers un château qu'ils n'ont pas encore vu. C'est Harida qui le reconnaît en premier et s'exclame :

-Mais, c'est notre château, c'est celui que nous venons de faire sur la plage. C'est exactement le même.

-Oui, c'est le vôtre.

-Comment est-ce possible ? demande Amidou, sceptique.

-C'est cela mon secret. Tous ces merveilleux châteaux de sable imaginés par tous les enfants de la terre ne meurent jamais, ils finissent ici, dans mon royaume au fond des océans. La mer les absorbe et me les offre en cadeau pour qu'ils ne disparaissent pas définitivement.

Le petit roi les emmène encore un peu plus loin. Il montre du doigt la tour d'un nouveau château qui se forme peu à peu.

-Voyez, c'est un château qui s'écroule là-haut sur une plage. Ici, il se construit au fur et à mesure qu'il disparaît, là-bas. Peut-être un enfant pleure-t-il sa perte, comme vous, il y a peu. Peut-être ne l'a-t-il pas vu s'écrouler et s'imagine qu'il se trouve toujours sur la plage. Demain, il le cherchera et ne le trouvera plus. Alors il en construira un nouveau. Venez.

Amidou et Harida retrouvent  tous les châteaux qu'ils ont façonnés là-haut avec enthousiasme. Leur regard s'emplit de leur souvenir et chaque bâtisse leur rappelle un moment de bonheur. Ils sont heureux à présent, car ils savent que rien ne meurt jamais et que lorsque quelque chose semble mourir quelque part, il est en train de naître ailleurs.

-Mais si les châteaux existent toujours quelque part, pourquoi croit-on toujours qu'ils disparaissent ?

-Pour que les enfants et leurs parents continuent à construire des châteaux de plus en plus beaux, pour qu'ils se perfectionnent dans l'art de la construction, qu'ils apprennent à vivre le présent et à se contenter de ces petits bonheurs éphémères, mais si merveilleux !

Le petit roi regarde les deux enfants avec tendresse.

-Allez maintenant ! Retournez dire aux enfants de la terre de ne plus pleurer leurs châteaux.

Le souverain effleure, du bout de ses doigts de sable, la tête du frère et de la sœur et retourne s'installer sur son trône, tandis que la belle dame réapparaît à l'autre extrémité du jardin merveilleux. Elle les prend par la main et les emmène vers une énorme bulle d'air, retenue au fond de l'eau par des cordes d'algues marines.

-Vous allez rentrer chez vous maintenant. Ne vous inquiétez de rien.

Elle ouvre la porte invisible de la bulle et les pousse à l'intérieur avant de la refermer. La dame leur fait encore un signe de la main, puis coupe les cordes de ce véhicule étonnant qui s'élève lentement vers la surface. Les petites sirènes nagent autour de la bulle en riant. Et Harida se met à rire elle aussi, à rire aux éclats, bientôt suivie par Amidou. Et ce sont deux enfants hilares que la maman retrouve couchés sur la plage quelques minutes plus tard.

-Que vous est-il arrivé ? J'ai cru que je vous avais perdus à jamais !

-C'est  à cause des châteaux de sable, tu sais. Ils existent toujours au fond de l'océan.

La maman, trop heureuse d'avoir retrouvé ses enfants, ne cherche pas à comprendre ce mystère. Quant à Amidou et Harida, ils garderont longtemps dans leur cœur le souvenir du petit roi et de ses châteaux de sable.

Fin